L'hymne védique du nom de Kama-gayatri décrit le visage de Krishna comme le souverain de toutes les lunes. Le langage métaphorique fait état de nombreuses lunes, mais elles sont toutes réunies en Krishna. On compte ainsi vingt-quatre lunes et demie, associées à Sa bouche, à Ses joues, aux marques de pulpe de santal qui ornent Son corps, aux extrémités de Ses doigts et de Ses orteils, qui toutes gravitent autour de la figure centrale qu'est Krishna.

La danse des pendants d'oreille, des yeux et des sourcils de Krishna exerce un irrésistible attrait sur les jeunes filles de Vraja. Les activités du service de dévotion font grandir le sentiment dévotionnel. Or, qu'y a-t-il à contempler au-delà du visage de Krishna ? Et comme deux yeux ne suffisent pas à embrasser toute la beauté de Krishna, comment ne pas se sentir à la fois impuissant et désespéré ? Ce sentiment de désolation s'estompe cependant quelque peu lorsqu'on l'attribue à l'incompétence du créateur. D'où cette complainte : " Loin d'avoir des milliers d'yeux, je n'en possède que deux; or, voilà qu'ils sont constamment entravés par le battement de mes paupières. J'en déduis que l'intelligence fait défaut à l'architecte de ce corps. Ignorant tout de l'art de la félicité, il n'est qu'un créateur prosaïque, incapable de faire en sorte que je puisse sans cesse ne voir que Krishna. "

Le mental des gopis se délecte constamment de la douceur du Corps de Krishna. Océan de beauté, Son visage angélique et Son sourire séduisant - sans oublier l'éclat de Son Corps - exercent sur elles une fascination sans limite. Le Krishna-karnamrita décrit ces trois éléments comme étant respectivement suave, encore plus suave et on ne peut plus suave. On parle de convulsion lorsque le corps purifié subit trois formes d'altération. C'est ainsi que, bouleversé à la vue de la beauté du Corps de Krishna, de Son visage et de Son sourire, le dévot accompli baigne dans un océan de convulsions mystiques qui, souvent, demeurent sans traitement, tout comme les convulsions ordinaires contre lesquelles un médecin ne peut rien, au point de refuser à son patient le verre d'eau qu'il réclame pour étancher sa soif.

Le dévot ressent toujours davantage l'absence de Krishna, car il lui est alors impossible de s'enivrer du nectar de Sa beauté. Lorsque résonne le son sublime de la flûte de Krishna, l'insoutenable désir du dévot de l'entendre transperce les enveloppes de l'univers matériel pour pénétrer dans le monde spirituel, où les sonorités divines de la flûte se glissent dans l'oreille des disciples des gopis. Le son de cette flûte ne quitte jamais l'oreille des gopis et ne cesse d'accroître leur félicité. Dès qu'elles l'entendent, aucun autre son ne peut plus les atteindre, si bien qu'elles ne savent plus répondre comme il se doit aux propos que leur tiennent les membres de leur famille, complètement envoûtées qu'elles sont par la beauté de ce qu'elles entendent.

(Les enseignements du Seigneur Caitanya, Chapitre 10)