Jeudi le 12 mars, 2009.
Lumières d'automne.
Illustration 37

Avec l'arrivée de l'automne, la mer agitée s'apaise, au même titre que le philosophe parvenu à la réalisation spirituelle cesse d'être troublé par les trois influences de la nature.

La réalisation spirituelle a pour effet de mettre un terme aux orages du désir et de la concupiscence, nés de la Passion et de l'Ignorance. Or, lorsque cette agitation prend fin, nous ne devenons pas pour autant inactifs, pas plus que ne cesse toute navigation à la suite d'une tempête en mer ; les activités maritimes peuvent alors au contraire se poursuivre en douceur. En Inde, la tradition veut qu'on offre une noix de coco à la mer le jour où elle retrouve son calme, car les long-courriers peuvent alors à nouveau voguer vers l'étranger.

Les trois influences de la nature divisent les activités humaines en deux catégories, l'une externe et l'autre interne. Tant que l'homme est dominé par la Passion et l'Ignorance, il s'affaire extérieurement, animé par le désir et la concupiscence. On le nomme asoura, celui qui, ainsi poussé par le désir et la concupiscence, poursuit les femmes et la richesse. C'est en effet à de telles fins que ces asouras exploitent toutes les possibilités du développement économique. Or, une telle civilisation a tôt fait de transformer la société humaine en une mer houleuse, dénuée de toute trace de paix et de prospérité réelle.

Une optique trop externe du monde engendre une forme démesurée d'industrie et de commerce, qu'on qualifie d'ougra-karma. Le mot ougra signifie " pénible ", ou " difficile ", et karma signifie " tâche ", ou " entreprise ". Et le déploiement d'efforts industriels excessifs entrave inévitablement le développement graduel de l'esprit. Les leaders " asouriques " de la société ne renoncent malheureusement jamais à d'aussi avides entreprises, du moins pas avant d'être exterminés par les lois de la nature. Pas question pour eux de prendre leur retraite ou de cultiver l'esprit. À l'opposé, ceux que gouverne la Vertu jouissent d'une mentalité introspective ; et après avoir ordonné leur subsistance selon certaines règles précises, ils se retirent à un âge avancé pour consacrer tout leur temps au développement de l'esprit.

Selon le principe même du varnashram, on doit prendre sa retraite vers l'âge de cinquante ans, sans aucune autre forme de considération. Tous les bureaux ferment à heure fixe, que le travail soit terminé ou non. Et de la même façon, nous devons, à cinquante ans, nous retirer de la vie active, ou externe, pour nous consacrer exclusivement au développement introspectif de l'esprit. Une telle retraite est obligatoire si l'on ne veut pas que l'évolution spirituelle de la société soit entravée par de vieux fous. Dans les démocraties modernes, personne ne devrait donc plus être élu passé l'âge de cinquante ans. Sinon, la tempête qui fait rage sur l'océan de l'ignorance ne pourra être subjuguée, et les navires qui s'y trouvent ne pourront le traverser pour retourner à Dieu. Les vieux fossiles aveugles de nos partis politiques, cherchant simplement à guider d'autres aveugles, représentent les pires ennemis de l'évolution spirituelle de la société. Ils ruinent tout simplement la paix sociale. Les générations plus jeunes ne sont pas aussi stupides que les vieux politiciens, si bien que les lois de l'État devraient systématiquement obliger ces derniers à se retirer de la vie active à l'âge de cinquante ans.