Dix-huitième chapitre.

Le parfait renoncement.




VERSET 17

yasya nahankrto bhavo
buddhir yasya na lipyate
hatvapi sa imaû lokan
na hanti na nibadhyate

TRADUCTION

Celui dont les actes ne sont pas motivés par le faux ego, dont l'intelligence ne s'enlise pas, tuât-il en ce monde, jamais ne tue. Jamais non plus ses actes ne l'enchaînent.

TENEUR ET PORTEE

Le Seigneur informe ici Arjuna que son désir de ne pas combattre procède du faux ego. Arjuna se croyait le seul agissant, il oubliait de considérer que l'Etre Suprême est Celui qui, de l'intérieur comme de l'extérieur, sanctionne l'acte. Et en quoi celui qui ignore cette vérité serait-il poussé à l'action? L'homme, cependant, qui sait de quelle nature sont les instruments de l'acte, qui se connaît pour l'agissant et voit le Seigneur Suprême en tant que maître de la sanction ultime, celui-là est parfait en tout ce qu'il accomplit. Il n'est jamais la proie de l'illusion. L'action égocentrique, avec la responsabilité qu'elle entraîne pour son auteur, procède du faux ego et de l'impiété, du manque de conscience de Krsna. Celui qui agit dans la conscience de Krsna, sous la direction de l'Ame Suprême, du Seigneur, celui-là, tuât-il, jamais ne tue. Il n'est jamais non plus sujet aux suites d'un tel acte. Qu'un soldat tue un ennemi sur l'ordre d'un supérieur, et il ne sera pas soumis au jugement. Mais qu'il tue de sa propre initiative, et il sera traîné devant une cour de justice.

VERSET 18

jnanam jneyam parijnata
tri-vidha karma-codana
karanam karma karteti
tri-vidhah karma-sangrahah

TRADUCTION

Le savoir, l'objet du savoir et le connaissant sont les trois facteurs qui suscitent l'acte. Les sens, l'acte en soi et son auteur forment la triple base de toute action.

TENEUR ET PORTEE

Il est trois sortes de stimulus pour les actes quotidiens: le savoir, l'objet du savoir et le connaissant. Les instruments de l'acte, l'acte en soi et son auteur sont appelés les éléments constituants de l'acte. Tout acte accompli par l'homme comporte ces six éléments. Précédant l'acte on trouve un stimulus, qu'on nomme l'inspiration. Et toute solution qui se présente à l'esprit avant la réalisation de l'acte n'est autre qu'une forme subtile de cet acte. En second lieu, cette forme subtile se manifeste, se change en l'acte lui-même; mais il faut d'abord traverser les processus psychologiques que sont le penser, le sentir et le vouloir, et qui constituent ce qu'on désigne sous le nom de stimulus. Ce stimulus, cette inspiration, ou la foi qui conduit à accomplir l'acte, et qui réfère en vérité au savoir, demeure le même qu'il vienne des Ecritures ou du maître spirituel. Et, quand l'inspiration et l'auteur se trouvent réunis, l'acte lui-même s'accomplit par le concours des sens. Le mental est le centre de tous les sens, et l'objet du mental est l'acte en soi. Telles sont les différentes phases de l'acte telles que les décrit la Bhagavad-gita. Les mots karma-sangrahah, "l'ensemble de l'action", indiquent la triple base de toute action.

VERSET 19

jnanam karma ca karta ca
tridhaiva guna-bhedatah
procyate guna-sankhyane
yathavac chrnu tany api

TRADUCTION

Il est trois ordres de savoir, d'actes et d'agissants; ils correspondent aux trois gunas. Ecoute-Moi te les décrire.

TENEUR ET PORTEE

Le quatorzième chapitre traite de façon élaborée des trois gunas. Nous pouvons y lire que de la vertu procède l'illumination, de la passion le matérialisme, et de l'ignorance la paresse et l'indolence. Tous les gunas enchaînent l'être à la matière; aucun d'entre eux ne saurait faire accéder à la libération. La vertu elle-même est facteur de conditionnement. Dans le dix-septième chapitre, le Seigneur décrit les diverses formes d'adoration, accomplies par les diverses sortes d'hommes, et déterminées par l'influence qu'exercent sur eux les gunas. Et dans notre verset, Il exprime Son désir de traiter des différentes sortes de savoir, d'actes et d'agissants, selon leur participation respective aux trois gunas.

VERSET 20

sarva-bhutesu yenaikam
bhavam avyayam iksate
avibhaktam vibhaktesu
taj jnanam viddhi sattvikam

TRADUCTION

Le savoir par quoi l'on distingue en toutes existences une essence spirituelle unique, impérissable, une au sein du multiple, ce savoir, sache-le, procède de la vertu.

TENEUR ET PORTEE

Celui qui voit une âme spirituelle en chaque être vivant -deva, homme, bête, oiseau, être aquatique ou plante- celui-là possède un savoir relevant de la vertu. Les êtres sont dotés de différents corps, que déterminent leurs actes antérieurs, mais en chacun de ces corps se trouve une âme spirituelle. Comme l'a enseigné le septième chapitre, la force vitale en chaque corps provient de l'énergie supérieure du Seigneur Suprême. Aussi, l'être qui en chaque corps voit cette unique nature supérieure, cette force vitale, celui-là possède la vision de la vertu. Les corps périssent, mais non pas cette énergie vitale, qui est éternelle. Parce que les formes de l'existence conditionnée sont multiples, on distingue les êtres en fonction du corps qu'ils revêtent, ce qui peut les faire voir comme divisés. Le savoir impersonnel dont parle ce verset conduit finalement l'être qui le possède à la réalisation spirituelle.


Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare