Quatrième chapitre.
Le savoir spirituel et absolu.
VERSET 21
TRADUCTION L'homme ainsi éclairé maîtrise parfaitement son mental et son intelligence; il renonce à tout sentiment de possession et n'agit que pour subvenir à ses stricts besoins vitaux. Ainsi, le péché ni les conséquences du péché ne l'atteignent. TENEUR ET PORTEE L'être conscient de Krsna n'attend aucun résultat, négatif ou positif, pour ses actes. Il maîtrise parfaitement son mental et son intelligence. Parce qu'il se connaît comme partie intégrante du Seigneur Suprême, il comprend que son rôle par rapport au Seigneur ne dépend pas de lui-même, mais du Seigneur. Tout se fait sous la direction du Seigneur, comme la main qui ne bouge qu'au gré du corps entier. Le pur bhakta unit toujours ses désirs à ceux du Seigneur; jamais ses actes n'ont pour motif de jouir de plaisirs matériels, égoïstes. Il agit en harmonie avec le Tout, comme l'élément d'une machine comme on huile et nettoie une machine, pour qu'elle fonctionne bien, l'homme conscient de Krsna prend soin de son corps, mais à seule fin de l'utiliser au service du Seigneur. Il est donc préservé des conséquences de tout ce qu'il entreprend. Comme l'animal domestique, qui n'a pas d'indépendance et jamais ne proteste, quelle que soit la volonté de son maître, il n'a pas la possession de son propre corps. Celui qu'absorbe la réalisation de Krsna ne trouve guère le temps de chercher à "posséder" quoi que ce soit de matériel. Ses besoins physiques se résument au simple maintien en vie du corps, il ne se soucie point d'amasser de l'argent par des moyens malhonnêtes. Ainsi, au lieu de laisser les actes coupables le charger de souillure, il s'affranchit de tout karma.
VERSET 22
TRADUCTION Celui qui, affranchi de la dualité et de l'envie, voit d'un même œil l'échec et la réussite, satisfait de ce qui lui vient naturellement, celui-là, bien qu'il agisse, ne s'enlise jamais. TENEUR ET PORTEE S'agissant des besoins du corps, l'homme conscient de Krsna ne s'épuise jamais en efforts superflus. Satisfait de ce qui lui vient naturellement, il ne mendie ni n'emprunte, mais fournit un travail honnête, dans la mesure de ses capacités; et ce qu'il obtient ainsi le contente pleinement. Il ne dépend donc pas des autres pour ce qui est de sa subsistance. En pratiquant la conscience de Krsna, jamais il ne laisse le service d'autrui entraver le sien propre. Toutefois, pour le service de Krsna, il peut tout faire, et sous n'importe quelles conditions, aucunement troublé par les dualités du monde matériel, Dépassant les dualités (chaleur et froid, joies et peines, etc.), il n'hésite devant aucune entreprise pour satisfaire Krsna, et il demeure résolu et serein, dans le succès comme dans l'échec. Tels sont quelques-uns des traits manifestés chez celui qui possède le savoir absolu.
VERSET 23
TRADUCTION Les actions de celui qui, ferme dans le savoir absolu, ne subit pas l'influence des trois gunas, sont purement spirituelles, accomplies pour la seule satisfaction de Yajna [Krsna]. TENEUR ET PORTEE On s'affranchit, en devenant conscient de Krsna, de l'emprise des dualités comme de la souillure des trois gunas, car on a retrouvé la relation éternelle qui nous unit à Dieu. Une fois ce savoir acquis, les pensées de l'homme ne s'écartent plus un instant de Krsna. Tout ce qu'il fait, il le dédie à Krsna, le Visnu originel; chacun de ses actes devient donc un sacrifice: agir pour la seule satisfaction de la Personne Suprême, Krsna, telle est la définition du sacrifice. Les suites de tels actes se fondent dans l'Absolu et cessent d'enchaîner l'auteur de ces derniers.
VERSET 24
TRADUCTION L'homme qu'absorbe pleinement la conscience de Krsna est assuré d'atteindre le royaume éternel, car ses actes sont tous purement spirituels: et par l'oblation et par l'offrande, ils participent de l'absolu. TENEUR ET PORTEE On trouve expliqué, dans ce passage, comment le fait d'agir en fonction des principes de la conscience de Krsna peut mener l'homme à la perfection spirituelle. La conscience de Krsna couvre un grand nombre d'activités, qui seront décrites dans les versets suivants. Mais ici, seul le principe de l'action dans la conscience de Krsna se trouve énoncé. Les actes de l'être conditionné sont obligatoirement souillés au contact de la matière; il lui faut donc quitter cet environnement. Comment? En appliquant les principes de la conscience de Krsna. Un homme qui souffre des intestins pour avoir abusé de lait peut guérir grâce au même aliment, transformé en caillé. De même, l'âme conditionnée peut, en adoptant la conscience de Krsna, être guérie du mal matériel, car ses actes relèvent alors du sacrifice (yajna), leur but unique étant devenu la satisfaction de Visnu (Krsna). Dans l'univers matériel, plus on agit pour Visnu, en pleine conscience de Krsna, plus l'atmosphère se spiritualise, comme par absorption. Brahman signifie "spirituel". Le Seigneur est purement spirituel, comme l'est la radiance qui émane de Son Corps absolu, le brahmajyoti. Or, tout ce qui existe se trouve dans ce brahmajyoti. Ce qu'on nomme "matière" participe toujours de la même substance (jyoti), mais, cette fois, recouverte du voile de l'illusion (maya). La conscience de Krsna peut en un instant déchirer ce voile; alors, l'offrande, ce qui la consume, le rite d'offrande, l'officiant et le fruit du sacrifice sont, réunis, brahman, absolus. L'Absolu, lorsque enveloppé du voile de maya, prend le nom de "matière", mais celle-ci retrouve sa qualité spirituelle dès qu'elle est à nouveau mise au service de la Vérité Absolue. La conscience de Krsna n'est autre que le moyen de convertir en conscience spirituelle et absolue notre conscience présente, engluée dans l'illusion. Retrouver cette conscience absolue de Krsna, y absorber son mental, tel est le samadhi. Tout acte accompli dans cette conscience est un yajna, sacrifice offert à l'Absolu, et l'auteur, l'offrande, la consomption, l'officiant et les fruits du sacrifice ne font plus qu'Un en l'Absolu, le Brahman Suprême. Telle est la voie de la conscience de Krsna.
VERSET 25
TRADUCTION Certains yogis rendent aux devas un culte parfait en leur offrant divers sacrifices, et d'autres sacrifient au feu du Brahman Suprême. TENEUR ET PORTEE Comme nous l'avons indiqué plus haut, l'homme agissant en accord avec les principes de la conscience de Krsna est le plus élevé, le plus parfait des yogis et des mystiques. Mais les dévots de Krsna ne sont pas seuls à offrir des sacrifices; il existe aussi des gens qui les destinent aux devas, ou bien au Brahman impersonnel. Selon la nature de leurs bénéficiaires, ces sacrifices se présentent sous différentes formes, mais cette diversité est superficielle, puisque tout sacrifice va, finalement, au Seigneur Suprême, Visnu, ou Yajna. On peut regrouper les diverses formes de sacrifices en deux grandes catégories: le sacrifice des biens matériels et le sacrifice visant la connaissance spirituelle. Pour la satisfaction du Seigneur Suprême, les bhaktas sacrifient tous leurs biens matériels. D'autres sacrifient également leurs possessions, mais dans le but de plaire aux devas (Indra, Vivasvan, etc.) et d'obtenir d'eux un bonheur matériel, éphémère. Ces devas sont des êtres à qui le Seigneur donna la puissance de régir l'univers matériel (en veillant à son illumination, à l'équilibre des chaleurs et des pluies, etc.). Et c'est à eux que les hommes avides de biens matériels rendent un culte, suivant les directives des Vedas. On appelle ces adorateurs des bahv-isvara-vadis, car leurs croyances revêtent la forme d'un polythéisme. Quant aux impersonnaliste, ils considèrent les devas comme autant d'êtres éphémères, et préfèrent sacrifier leur individualité dans le feu de l'Absolu, en s'identifiant au Brahman impersonnel, qu'ils vénèrent. Ils passent leur temps à d'infinies spéculations philosophiques, où ils espèrent découvrir la nature de l'Absolu. Bref, l'homme avide du fruit de ses actes sacrifie ses biens matériels, en vue d'accroître ses plaisirs matériels, tandis que l'impersonnaliste sacrifie lui, son identité matérielle, afin de se fondre dans l'existence de l'Absolu. Pour ce dernier, le feu du sacrifice, c'est le Brahman Suprême, l'offrande, c'est l'individualité, que consume le feu du Brahman. Le bhakta, sur le modèle d'Arjuna, sacrifie, pour la satisfaction de Krsna, tout son avoir, ses biens comme sa personne, mais sans perdre jamais son individualité. Il est le plus parfait des yogis.
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