SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 5
CHAPITRE 24

Les planètes édéniques
situées en dessous de la
Terre.

VERSET 21

tad bhaktanam atmavatam sarvesam atmany atmada atmatayaiva.

TRADUCTION

Le Seigneur Souverain, qui Se trouve dans le coeur de chaque être en tant qu'Ame Suprême, consent à devenir la propriété de Ses dévots [comme Narada Muni]. Autrement dit, Il confère l'amour pur à de tels bhaktas et Se donne Lui-même à ceux qui L'aiment d'un coeur pur. D'illustres yogis, âmes réalisées [comme les quatre Kumaras] puisent également une grande félicité spirituelle en percevant l'Ame Suprême sise en eux.

TENEUR ET PORTEE

Le Seigneur ne Se fit pas le portier de Bali Maharaja parce que celui-ci Lui avait tout donné, mais plutôt parce qu'il se distinguait par son amour pour Lui.

VERSET 22

na vai bhagavan nunam amusyanujagraha yad uta punar atmanusmrti-
mosanam mayamaya-bhogaisvaryam evatanuteti.

TRADUCTION

La Personne Suprême n'accorda pas Sa miséricorde à Bali Maharaja en lui conférant l'opulence et le bonheur matériels, car ceux-ci vont oublier le service d'amour qu'on Lui offre. Les prospérités matérielles contribuent en effet à détourner de Dieu notre mental.

TENEUR ET PORTEE

Il existe deux sortes de prospérités, l'une matérielle, résultant du karma, et l'autre spirituelle. Une âme entièrement abandonnée à Dieu, la Personne Suprême, et s'en remettant totalement à Lui, ne désire pas la prospérité matérielle liée à la satisfaction des sens. Par suite, lorsqu'on voit un pur bhakta en possession de richesses matérielles hors du commun, celles-ci ne sont pas dues à son karma, mais plutôt à sa bhakti. Autrement dit, s'il se trouve dans cette position, c'est parce que le Seigneur Suprême souhaite qu'il puisse Le servir sans aucune peine et dans l'opulence. Quant au bhakta néophyte, le Seigneur lui témoigne tout spécialement Sa grâce en l'appauvrissant matériellement; et c'est bien là Sa miséricorde, car si un néophyte se trouve dans une situation matérielle prospère, il oublie le service du Seigneur. En revanche, si un bhakta avancé bénéficie de la faveur du Seigneur sous forme d'opulence, il ne s'agit pas là de facilités matérielles, mais bien d'un atout spirituel. L'opulence matérielle offerte aux devas leur fait oublier le Seigneur, mais l'opulence accordée à Bali Maharaja lui permit de continuer à servir le Seigneur, sans qu'il subisse la moindre influence de maya.

VERSET 23

yat tad bhagavatanadhigatanyopayena yacna-cchalenapahrta-sva-
sariravasesita-loka-trayo varuna-pasais ca sampratimukto giri-daryam
capaviddha iti hovaca.

TRADUCTION

Ne voyant aucun autre moyen d'arracher toutes ses possessions à Bali Maharaja, le Seigneur Souverain Se présenta à lui comme un mendiant, et grâce à ce subterfuge, Il lui enleva les trois mondes. Il ne restait plus au roi que son corps, mais le Seigneur n'était pas encore satisfait; Il arrêta Bali Maharaja, l'attacha avec les cordes de Varuna et le jeta dans une caverne de montagne. Cependant, bien que tout lui eût été enlevé et qu'il fût ainsi emprisonné, Bali Maharaja était un si grand bhakta qu'il prononça les paroles suivantes:

VERSET 24

nunam batayam bhagavan arthesu na nisnato yo sav indro yasya sacivo
mantraya vrta ekantato brhaspatis tam atihaya svayam upendrenatmanam
ayacatatmanas casiso no eva tad-dasyam ati-gambhira-vayasah kalasya
manvantara-parivrttam kiyal loka-trayam idam.

TRADUCTION

"Hélas! N'est-il pas déplorable qu'Indra, le monarque des cieux, en dépit de sa remarquable érudition et de sa grande puissance, et bien qu'il ait choisi Brhaspati comme premier ministre afin qu'il l'instruise, ignore tout du progrès spirituel? Brhaspati lui-même manque d'intelligence, car il n'a pas instruit comme il convient son disciple. Lorsque Vamanadeva Se présenta à sa porte, plutôt que de L'implorer de le laisser prendre part à Son service d'amour divin, le roi Indra se servit de Lui pour me demander une aumône en vue d'obtenir les trois mondes pour la satisfaction de ses sens. Or, la souveraineté sur les trois mondes est bien insignifiante, car toute possession matérielle ne dure au plus qu'un âge de Manu, ce qui ne représente qu'une fraction infime du temps infini.

TENEUR ET PORTEE

Bali Maharaja était si puissant qu'il avait vaincu Indra au combat et avait ainsi pris possession des trois mondes. Assurément, le savoir d'Indra était vaste, mais plutôt que de demander à Vamanadeva de pouvoir Le servir, il se servit du Seigneur pour obtenir des avantages matériels qui prendraient fin au terme d'un âge de Manu. Un âge de Manu, c'est-à-dire la durée de sa vie, s'étend sur soixante-douze yugas, et un yuga représente quatre millions trois cent mille (4 300 000) ans; la vie de Manu dure donc trois cent neuf millions six cent mille (309 600 000) ans. Or, les devas ne jouissent de leurs possessions matérielles que jusqu'à la fin de la vie de Manu. Le temps ne peut être vaincu; et quel que soit le temps qui nous est alloué, serait-ce des millions d'années, il passe très rapidement. Les devas ne jouissent d'avantages matériels que dans les limites du temps. C'est pourquoi Bali Maharaja déplora qu'Indra, malgré son érudition, n'ait pas su utiliser son intelligence. En effet, plutôt que de prier Vamanadeva de lui permettre de Le servir, il s'était servi de Lui pour mendier auprès de lui -Bali Maharaja- quelque richesse matérielle. Bien qu'Indra fût érudit, de même que son premier ministre Brhaspati, ni l'un ni l'autre ne demandèrent de pouvoir servir avec amour Sri Vamanadeva. C'est pour cette raison que Bali Maharaja s'apitoie ici.

VERSET 25

yasyanudasyam evasmat-pitamahah kila vavre na tu sva-pitryam yad
utakutobhayam padam diyamanam bhagavatah param iti bhagavatoparate
khalu sva-pitari.

TRADUCTION

Mon grand-père, Prahlada Maharaja, est le seul à avoir eu conscience de son intérêt véritable. Après la mort d'Hiranyakasipu, le père de Prahlada, Sri Nrsimhadeva voulut offrir à celui-ci le royaume de son père, et même lui accorder la libération du joug de la matière, mais Prahlada n'accepta aucune de ces deux bénédictions. La libération et la prospérité matérielle, songea-t-il, entravent le service de dévotion, de telle sorte que ces présents du Seigneur Souverain ne constituent pas Sa vraie miséricorde. En conséquence, plutôt que d'accepter les fruits du karma et du jnana, Prahlada Maharaja pria le Seigneur de simplement pouvoir se faire le serviteur de Son serviteur.

TENEUR ET PORTEE

Sri Caitanya Mahaprabhu a enseigné qu'un bhakta pur et inconditionnel doit se considérer comme un serviteur du serviteur du serviteur du Seigneur Suprême (gopi-bhartuh pada-kamalayor dasa-dasanudasah). En effet, selon la philosophie vaisnava, on ne doit même pas désirer devenir un serviteur direct du Seigneur. Prahlada Maharaja s'est vu offrir toutes les bénédictions permettant d'occuper une position privilégiée dans l'univers matériel, et même la libération qui consiste à se fondre dans le Brahman, mais il refusa tout cela; il préférait simplement se mettre au service du serviteur du serviteur du Seigneur. Voilà donc pourquoi Bali Maharaja dit que son grand-père, Prahlada Maharaja, qui sut rejeter ces bénédictions du Seigneur Souverain -l'opulence matérielle et la libération-, connaissait véritablement son intérêt propre.


Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare