SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 5 CHAPITRE 3 Apparition de Rsabhadeva
dans le sein de Merudevi, l'épouse du roi Nabhi.
asanga-nisita-jnananala-vidhutasesa-malanam bhavat-svabhavanam
atmaramanam muninam anavarata-parigunita-guna-gana parama- mangalayana-guna-gana-kathano si.
Les prêtres présents dans l'arène sacrificielle de Maharaja Nabhi appréciaient la présence personnelle du Seigneur Suprême, Sri Visnu, et se sentaient très obligés envers Lui. L'apparition du Seigneur est en effet chose rare, même pour les illustres et saints personnages qui se sont entièrement détachés de ce monde matériel et dont le coeur se trouve purifié par le chant constant des gloires du Seigneur. Puisque de tels êtres trouvent leur satisfaction dans la glorification des Attributs divins du Seigneur, Sa présence personnelle auprès d'eux n'est pas vraiment nécessaire. Les prêtres soulignent ici que le Seigneur apparaît très rarement, même devant d'aussi éminents sages, mais qu'Il eut néanmoins l'extrême bonté de Se manifester en personne devant eux. Aussi les prêtres se sentaient-ils infiniment obligés envers Lui.
atha kathancit skhalana-ksut-patana-jrmbhana-duravasthanadisu
vivasanam nah smaranaya jvara-marana-dasayam api sakala-kasmala- nirasanani tava guna-krta-namadheyani vacana-gocarani bhavantu.
Notre vie sera véritablement une réussite si nous nous rappelons le Saint Nom, les Attributs, les Activités et la Forme du Seigneur au moment de notre mort (ante narayana-smrti). Même si nous sommes occupés à servir le Seigneur dans le temple, les conditions de vie en ce monde sont si rudes que nous risquons de L'oublier à l'heure de notre mort, à cause de la maladie ou de dérangements d'ordre mental. Nous devons donc prier le Seigneur afin de pouvoir nous rappeler à coup sûr Ses pieds pareils-au-lotus au moment de mourir, alors que nous nous trouverons dans une situation fort précaire. A cet égard, le lecteur peut également se reporter aux versets neuf, dix, quatorze et quinze du deuxième chapitre du sixième Chant du Srimad-Bhagavatam.
kincayam rajarsir apatya-kamah prajam bhavadrsim asasana
isvaram asisam svargapavargayor api bhavantam upadhavati prajayam artha-pratyayo dhanadam ivadhanah phalikaranam.
Les prêtres étaient un peu honteux, car le roi Nabhi offrait un grand sacrifice à seule fin d'obtenir du Seigneur qu'Il lui accorde un fils, alors que Celui-ci aurait pu l'élever jusqu'aux planètes édéniques, ou même jusqu'aux planètes Vaikunthas. Sri Caitanya Mahaprabhu nous a enseigné la façon dont nous devons nous adresser au Seigneur Suprême pour Lui demander la bénédiction ultime: na dhanam na janam na sundarim kavitam va jagad-isa kamaye.(Siks.,IV) Il ne voulait rien demander de matériel au Seigneur. La prospérité matérielle se traduit par des richesses, une belle famille, une bonne épouse et un grand nombre de disciples, mais un bhakta intelligent ne demande à Dieu aucune bénédiction de cet ordre. Sa seule prière tient dans les mots mama janmani janmanisvare bhavatad bhaktir ahaituki tvayi: il veut à jamais servir le Seigneur avec amour. Il n'aspire nullement à atteindre les planètes édéniques ou la libération (mukti). S'il en était autrement, Sri Caitanya Mahaprabhu n'aurait pas dit: mama janmani janmani. Peu importe à un bhakta de renaître en ce monde vie après vie, pourvu qu'il demeure un bhakta. En fait, la liberté éternelle consiste à retourner à Dieu, dans sa demeure originelle. Jamais un bhakta ne se soucie d'obtenir quoi que ce soit de matériel. Certes, Nabhi Maharaja désirait un fils comme Visnu, mais désirer un fils semblable à Dieu est aussi une forme de recherche de satisfaction personnelle. Un pur bhakta n'aspire qu'à servir le Seigneur avec amour.
ko va iha te parajito parajitaya mayayanavasita-padavyanavrta-matir
visaya-visa-rayanavrta-prakrtir anupasita-mahac-caranah.
Maharaja Nabhi était disposé à accomplir de grands sacrifices afin d'obtenir un fils. Le fils souhaité a beau égaler Dieu, la Personne Suprême, un tel désir matériel, qu'il soit insignifiant ou grandiose, n'en est pas moins toujours suscité par l'influence de maya. Un bhakta ne désire absolument rien pour la satisfaction de ses sens. Aussi dit-on que la dévotion est dénué de tout désir matériel (anyabhilasita-sunya). Ici-bas, tout le monde est influencé par maya, empêtré dans un réseau complexe de désirs matériels, et Maharaja Nabhi ne faisait pas exception à la règle. On ne peut se délivrer de l'influence de maya que lorsqu'on se met au service des grands bhaktas (mahac-carana-seva); à moins de vénérer les pieds pareils-au-lotus d'un grand dévot du Seigneur, nul ne peut échapper à cette influence. D'où ces mots de Srila Narottama Dasa Thakura: chadiya vaisnava- seva nistara payeche keba -"Qui a pu se soustraire aux griffes de maya sans servir les pieds pareils-au-lotus d'un vaisnava?" Maya et son influence sont aparajitas. C'est ce que confirme la Bhagavad-gita (VII.14): daivi hy esa gunamayi mama maya duratyaya -"L'énergie que constituent les trois gunas, cette énergie divine, la Mienne, on ne peut, sans mal, la surmonter." Seul un bhakta peut triompher de l'influence implacable de maya. Maharaja Nabhi n'était pas à blâmer parce qu'il voulait un fils; il en désirait un qui soit comparable à Dieu, la Personne Suprême, lequel est assurément le meilleur des fils. Toutefois, au contact d'un dévot du Seigneur, on cesse d'aspirer à la moindre forme de bienfait matériel. Le Caitanya-caritamrta (Madhya 22.54) nous le confirme:
"sadhu-sanga", "sadhu-sanga" sarva-sastre kaya
Et encore:lava-matra sadhu-sange sarva-siddhi haya
mahat-krpa vina kona karme 'bhakti' naya
Celui qui, sérieusement, veut échapper à l'influence de maya et retourner à Dieu, dans sa demeure originelle, doit vivre au contact d'un sadhu, d'un dévot du Seigneur; telle est l'opinion de toutes les Ecritures. Même quelques courts moments passés en compagnie d'un bhakta peuvent nous délivrer de l'emprise de maya. Au contraire, sans la miséricorde d'un pur dévot du Seigneur, nul ne peut connaître la liberté, quels que soient les moyens qu'il mette en oeuvre. La compagnie d'un pur bhakta est sans conteste nécessaire pour obtenir le service d'amour du Seigneur. Nul ne peut donc échapper aux rets de maya sans le sadhu-sanga, ou la grâce d'un grand bhakta. Dans le Srimad-Bhagavatam (7.5.32), Prahlada Maharaja enseigne:krsna-bhakti dure rahu, samsara nahe ksaya (C.c., Madhya 22.51)
yad u ha vava tava punar adabhra-kartar iha samahutas tatrartha-dhiyam
mandanam nas tad yad deva-helanam deva-devarhasi samyena sarvan prativodhum avidusam.
Les prêtres etaient désolés d'avoir fait venir de Vaikuntha le Seigneur Suprême pour un motif aussi futile. Un pur bhakta ne désire jamais voir le Seigneur sans nécessité. Celui-ci est occupé à diverses activités, et Son pur dévot ne désire pas Le voir par caprice, pour sa propre satisfaction; il dépend entièrement de la miséricorde du Seigneur, et lorsque Ce dernier est satisfait de son attitude, Il Se révèle directement à lui, en personne. Même des devas du rang de Brahma et de Siva ne peuvent voir le Seigneur. Aussi, en appelant Sri Visnu, les prêtres de Nabhi Maharaja firent preuve d'un manque d'intelligence; néanmoins, le Seigneur vint tout de même à eux en vertu de Sa miséricorde immotivée, si bien qu'ils désirèrent tous se faire pardonner leur audace. Les autorités spirituelles n'approuvent pas l'adoration du Seigneur Suprême visant à obtenir quelque bienfait matériel. La Bhagavad-gita (VII.16) nous dit à ce propos:
catur-vidha bhajante mam
''O Arjuna, toi le meilleur des Bharatas, les gens vertueux qui, avec dévotion, Me servent, sont de quatre ordres: les malheureux, les curieux, les hommes qui poursuivent la richesse et ceux qui désirent connaître l'Absolu." L'initiation à la bhakti se fait dans l'une ou l'autre des conditions décrites dans ce verset ; toutefois, ceux qui s'adressent au Seigneur Suprême avec un tel état d'esprit ne sont pas de véritables bhaktas. Ils peuvent néanmoins être considérés comme vertueux (sukrtinah), parce qu'ils s'enquièrent de la Vérité Absolue. de Dieu, la Personne Suprême. Ignorants comme ils le sont des diverses occupations et activités du Seigneur, ils Le dérangent sans raison, à seule fin de satisfaire leurs désirs matériels. Cependant, la bienveillance du Seigneur est telle que même quand Il est dérangé de la sorte, Il exauce les désirs de pareils mendiants. Le pur bhakta est anyabhilasita-sunya: son adoration ne recouvre aucun intérêt personnel. Ce n'est l'influence de maya sous la forme du karma ou du jnana qui le pousse à agir. Le pur bhakta se montre toujours prêt à exécuter l'ordre du Seigneur, abstraction faite de toute considération personnelle. Les rtvijah (les prêtres participant au sacrifice) connaissaient très bien la distinction entrekarma et bhakti, et s'estimant sous l'influence du karma (l'action intéressée), ils implorèrent le pardon du Seigneur. Ils savaient qu'Il avait été invité pour une raison de peu d'importance.
janah sukrtino rjuna arto jijnasur artharthi jnani ca bharatarsabha
Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare |