SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 5 CHAPITRE 5 Les enseignements de
Rsabhadeva à Ses fils.
rsabha uvaca
nayam deho deha-bhajam nrloke kastan kaman arhate vid-bhujam ye tapo divyam putraka yena sattvam suddhyed yasmad brahma-saukhyam tv anantam
Mes chers enfants, d'entre tous les êtres ayant revêtu en ce monde des corps matériels, ceux auxquels une forme humaine a été octroyée ne devraient pas peiner jour et nuit en vue du seul plaisir des sens, accessible même aux chiens et aux porcs qui se nourrissent d'excréments. Ils devraient plutôt pratiquer la pénitence et l'austérité pour atteindre le niveau divin du service de dévotion. Grâce à cette pratique, le coeur se purifie et on découvre alors une existence éternelle et toute de félicité, qui transcende le bonheur matériel et dure à jamais.
Dans ce verset, Sri Rsabhadeva parle à Ses fils de l'importance de la vie humaine. Les mots deha-bhak désignent quiconque revêt un corps matériel, mais l'être qui se voit attribuer une forme humaine ne doit pas agir comme un animal. Les chiens et les porcs, par exemple, satisfont leurs sens en mangeant des excréments. De même, après une dure journée de labeur, certains êtres "humains" s'efforcent la nuit venue de trouver le plaisir en mangeant, en buvant, en se livrant aux plaisirs de la chair, en dormant. Il leur faut de plus se protéger de toute agression éventuelle. Cependant, ce n'est pas ainsi que vit un homme civilisé. Un être humain digne de ce nom doit accepter volontairement certaines souffrances en vue du progrès spirituel. Il est bien entendu que les animaux et les plantes connaissent également la souffrance du fait de leurs actes passés; toutefois, l'être humain se doit d'accepter certaines souffrances volontaires sous forme d'austérités afin d'accéder à la vie divine, ce qui lui permettra de jouir du bonheur éternel. Chaque être vivant s'efforce de trouver le bonheur, mais tant qu'il est emprisonné dans un corps matériel, il doit subir toutes sortes de maux. Or, l'homme est sensible à des valeurs supérieures. Il doit donc agir en accord avec la connaissance supérieure qui lui est transmise afin d'accéder au bonheur éternel et de retourner à Dieu. Il ressort nettement de ce verset que le gouvernement et le père, protecteur naturel, devraient éduquer ceux qui dépendent d'eux et les élever à la conscience de Krsna. Privé de la conscience de Krsna, tout être doit souffrir du fait qu'il est plongé dans le cycle perpétuel de la naissance et de la mort. Pour permettre à chacun de s'affranchir de ce carcan et d'accéder au bonheur et à la félicité, il faut enseigner le bhakti-yoga. Une civilisation irresponsable néglige d'éduquer l'homme sur la façon d'accéder au niveau du bhakti-yoga; pourtant, sans conscience de Krsna, une personne ne vaut pas mieux qu'un chien ou un porc. Les instructions de Rsabhadeva revêtent un caractère essentiel à notre époque, où l'on éduque et forme les gens à travailler comme des bêtes de somme pour satisfaire leurs sens, sans pour autant donner un but sublime à l'existence. Les hommes doivent faire des distances considérables pour aller gagner leur pain; ils quittent leur foyer tôt le matin pour ne pas manquer le train, dans lequel ils doivent voyager debout dans un compartiment bondé pendant une heure ou deux; puis, ils prennent le car pour aller jusqu'à leur lieu de travail. Au bureau, ils doivent travailler pendant huit heures, puis à nouveau compter deux ou trois heures de déplacement pour retourner chez eux. Après avoir mangé, ils ont des rapports sexuels et finissent par dormir. En échange de tout le mal qu'ils se sont donné, ils n'obtiennent pour tout bonheur qu'un peu de plaisir charnel (yan maithunadi-grhamedhi-sukham hi tuccham). Rsabhadeva indique clairement que la vie humaine n'est pas destinée à ce genre d'existence, accessible même aux chiens et aux porcs. En fait, les chiens et les porcs n'ont même pas à travailler à ce point pour pouvoir s'accoupler. L'être humain devrait adopter un mode de vie différent et ne pas chercher à imiter ces animaux. L'alternative? Elle est également mentionnée: l'homme doit se livrer au tapasya, à l'austérité et à la pénitence, grâce à quoi il pourra s'arracher aux pièges de la matière. Une fois établi dans la Conscience de Krsna, dans le service de dévotion, son bonheur est garanti pour l'éternité. L'être distinct poursuit le bonheur vie après vie, mais il peut résoudre tous ses problèmes par la simple pratique du bhakti-yoga. Il obtient alors aussitôt de pouvoir retourner à Dieu, dans sa demeure originelle, ainsi que le confirme la Bhagavad-gita (IV.9):
mahat-sevam dvaram ahur vimuktes
tamo-dvaram yositam sangi-sangam mahantas te sama-cittah prasanta vimanyavah suhrdah sadhavo ye
La vie humaine représente une sorte d'embranchement, à partir duquel on peut emprunter soit la voie de la libération, soit celle qui conduit à une condition infernale. La façon dont on choisit ces voies est ici décrite. Sur la voie de la libération, on recherche la compagnie des mahatmas, alors que sur celle de la servitude, on fréquente les êtres attachés aux femmes et aux plaisirs des sens. Il existe deux sortes de mahatmas: l'impersonnaliste et le bhakta. Bien que leur but final soit différent, le processus d'émancipation est presque le même. Tous deux désirent le bonheur éternel, l'un dans le Brahman impersonnel et l'autre dans la compagnie de Dieu, la Personne Suprême. Pour reprendre les termes du premier verset -brahma-saukhyam-, brahman signifie "spirituel" ou "éternel", et l'impersonnaliste aussi bien que le bhakta recherchent une existence éternelle de félicité. Dans un cas comme dans l'autre, il est recommandé de devenir parfait. Selon le Caitanya-caritamrta (Madhya 22.87):
ye va mayise krta-sauhrdartha
janesu dehambhara-vartikesu grhesu jayatmaja-ratimatsu na priti-yukta yavad-arthas ca loke
Qu'il soit impersonnaliste ou bhakta, celui qui désire vraiment progresser dans la vie spirituelle ne doit pas fréquenter ceux qui ne songent qu'à entretenir leur corps en ayant recours au prétendu progrès de la civilisation. Ceux que préoccupe la vie spirituelle doivent éviter de s'attacher au confort de la vie au foyer en compagnie de leur femme, de leurs enfants, de leurs amis, etc. Même si l'on est un grhastha et que l'on doit gagner sa vie, il faut se contenter de ne gagner que l'argent nécessaire pour avoir juste de quoi vivre, ni plus ni moins. Comme l'indique ce verset, le chef de famille doit s'efforcer de gagner de l'argent afin de pouvoir pratiquer le bhakti-yoga:
sravanam kirtanam visnoh
Le chef de famille doit organiser sa vie de façon à pouvoir amplement écouter et chanter les gloires de Dieu. Il doit adorer la murti chez lui, célébrer la fêtes du calendrier spirituel, inviter des amis et leur servir du prasada. C'est à cette fin qu'il doit gagner de l'argent, et non pour satisfaire ses sens.
smaranam pada-sevanam arcanam vandanam dasyam sakhyam atma-nivedanam (S.B.,7.5.23)
nunam pramattah kurute vikarma
yad indriya-pritaya aprnoti na sadhu manye yata atmano yam asann api klesada asa dehah
Ce verset condamne le fait de mendier, d'emprunter ou de voler en vue de la satisfaction des sens, car agir ainsi nous entraînerait dans une condition infernale des plus sombres. Les quatre activités pécheresses sont la vie sexuelle illicite, la consommation de viande, l'usage d'excitants et de substances toxiques, et le jeu. Ce sont les quatre voies qui conduisent l'être vers un nouveau corps matériel sujet à toutes sortes de souffrances. Les Vedas enseignent: asango hy ayam purusah. L'être vivant n'a pas vraiment de lien avec l'univers de matière; toutefois, du fait de sa tendance à jouir du plaisir des sens, il se voit plongé dans l'existence matérielle. Il faut donc parfaire sa vie en recherchant la compagnie des bhaktas, et ne pas chercher à satisfaire outre mesure les besoins du corps.
parabhavas tavad abodha-jato
yavan na jijnasata atma-tattvam yavat kriyas tavad idam mano vai karmatmakam yena sarira-bandhah
En général, les gens croient qu'il faut agir avec une grande piété pour être délivré de toute souffrance, mais c'est là une erreur, car même si on se conduit de manière vertueuse et si on se livre à la spéculation intellectuelle, on devra néanmoins connaître la défaite. Notre seul but doit être de nous libérer de l'emprise de maya et de toute activité matérielle. La connaissance spéculative et les actes pieux ne résolvent en rien les problèmes de l'existence matérielle. Il nous faut cultiver le savoir qui nous permettra de comprendre notre nature spirituelle. La Bhagavad-gita (VI.37) enseigne à ce propos:
Tant qu'il n'a pas conscience de l'âme et de ses activités, l'être vivant doit être considéré comme enchaîné à la matière. Le Srimad-Bhagavatam (10.2.32) explique dans un autre passage que des personnes ignorant tout du service de dévotion peuvent se croire libérées, mais qu'en fait il n'en est rien (ye nye ravindaksa vimukta-maninas tvayy asta-bhavad avisuddha-buddhayah). Aruhya krcchrena param padam tatah patanty adho nadrta-yusmad-anghrayah: il se peut qu'elles atteignent la radiance impersonnelle du Brahman, mais elles retomberont ensuite au niveau des plaisirs matériels, car elles ne connaissent pas le service de dévotion. Tant que l'on s'intéresse au karma et au jnana, on doit continuer à souffrir des maux liés à l'existence matérielle -naissance, maladie vieillesse et mort. Pour ce qui est des karmis, ils revêtent pour sûr un corps matériel, vie après vie; quant aux jnanis, tant qu'ils n'atteignent pas le plus haut niveau de connaissance, eux aussi doivent revenir en ce monde. Il est dit dans la Bhagavad-gita (VII.19): bahunam janmanam ante jnanavan mam prapadyate -l'important est de réaliser que Krsna, Vasudeva, est tout ce qui existe, et de s'abandonner à Lui. Les karmis ignorent cette vérité, mais le bhakta totalement absorbé dans le service de dévotion qu'il offre au Seigneur sait parfaitement ce que recouvrent le karma et le jnana et pour lui ni l'un ni l'autre n'exercent plus le moindre attrait. Anyabhilasita-sunyam jnana-karmady-anavrtam: le véritable bhakta est audelà du moindre désir lié au karma et au jnana; son seul but dans l'existence consiste à servir le Seigneur.
Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare |