iti ha sma sakala-veda-loka-deva-brahmana-gavam parama-guror
bhagavata-rsabhakhyasya visuddhacaritam iritam pumsam samasta-
duscaritabhiharanam parama-maha-mangalayanam idam
anusraddhayopacitayanusrnoty asravayati vavahito bhagavati tasmin
vasudeva ekantato bhaktir anayor api samanuvartate.

[Sukadeva Gosvami poursuivit:]
Sri Rsabhadeva est le maître de tout le savoir védique, des êtres humains, des devas, des vaches et des brahmanas. J'ai déjà expliqué Ses Actes purs, spirituels et absolus, lesquels auront raison des fautes de tous les êtres distincts, Ce récit des Divertissements de Rsabhadeva est source de toute heureuse fortune; quiconque le rapporte ou y prête une oreille attentive, suivant en cela les traces des acaryas, obtiendra sûrement de servir avec une dévotion pure les pieds pareils-au-lotus de Vasudeva, le Seigneur Souverain.

Les enseignements de Rsabhadeva s'adressent aux hommes vivant dans tous les yugas -dans le satya-yuga, le treta-yuga, le dvapara-yuga, et plus spécialement dans le kali-yuga. Ces instructions recèlent une puissance telle que, même dans cet âge de Kali, il est possible d'atteindre la perfection par le simple fait de les enseigner en marchant sur les traces des acaryas, ou de les écouter attentivement. En agissant ainsi, on peut parvenir au niveau du service de dévotion pur offert à Vasudeva. C'est d'ailleurs afin que ceux qui les récitent et les écoutent deviennent purifiés que le Srimad-Bhagavatam relate les Divertissements du Seigneur Souverain et de Ses dévots. Nityam bhagavata-sevaya: par principe, les bhaktas devraient lire, enseigner et entendre le Srimad-Bhagavatam de façon continue, vingt-quatre heures par jour si possible. C'est là ce que recommande Sri Caitanya Mahaprabhu (kirtaniyad sada harih). Il faut soit chanter le maha-mantra Hare Krsna, soit lire le Srimad-Bhagavatam, et essayer ainsi de comprendre les caractéristiques et les enseignements du Seigneur Suprême, qui S'est manifesté en tant que Rsabhadeva, Kapila et Krsna. On peut de la sorte devenir parfaitement conscient de la nature divine et absolue de la Personne Souveraine. Et comme l'enseigne la Bhagavad-gita, celui qui connaît la nature transcendante de l'Avènement et des Activités du Seigneur obtient d'être libéré des chaînes de la matière et de retourner à Dieu.

yasyam eva kavaya atmanam aviratam vividha-vrjina-samsara-
paritapopatapyamanam anusavanam snapayantas tayaiva paraya
nirvrtya hy apavargam atyantikam parama-purusartham api svayam
asaditam no evadriyante bhagavadiyatvenaiva parisamapta-sarvarthah.

Les bhaktas se plongent constamment dans le service de dévotion afin d'être soulagés des vicissitudes de l'existence matérielle. Ils goûtent ainsi à la félicité suprême, et la libération en personne vient les servir. Néanmoins, ils n'acceptent pas ce service, même s'il leur est offert par Dieu en personne. Pour un bhakta, la libération [mukti] a bien peu d'importance, car, ayant accédé au service d'amour sublime du Seigneur, il a obtenu tout ce qu'on peut désirer et a transcendé tout désir matériel.

Le service de dévotion offert au Seigneur représente la plus haute bénédiction pour quiconque aspire à échapper aux vicissitudes de l'existence matérielle. Comme l'enseigne la Bhagavad-gita (VI.22): yam labdhva caparam labham manyate nadhikam tatah -"Cette perfection atteinte, l'âme sait que rien n'est plus précieux." Lorsqu'on a accès au service de dévotion -qui ne diffère pas du Seigneur Lui-même-, on ne désire rien de matériel. La mukti consiste à être délivré de l'existence matérielle, et Bilvamangala Thakura disait à ce propos: muktih mukulitanjalih sevate sman -pour un bhakta, la mukti ne représente pas un gain très remarquable. La véritable mukti consiste pour les êtres vivants à réintégrer leur position naturelle et originelle. Celle-ci est la même pour tous: ils sont serviteurs du Seigneur. Par suite, lorsqu'on a adopté le service d'amour du Seigneur, on a déjà atteint la mukti. C'est pourquoi le bhakta n'aspire pas à la libération même si elle lui est offerte par le Seigneur en personne.

rajan patir gurur alam bhavatam yadunam
daivam priyah kula-patih kva ca kinkaro vah
astv evam anga bhagavan bhajatam mukundo
muktim dadati karhicit sma na bhakti-yogam

Mon cher roi, c'est en réalité le Seigneur Souverain, Mukunda, qui soutient tous les membres des dynasties Pandava et Yadu. C'est Lui votre maître spirituel, le Dieu que vous adorez, votre ami, Celui qui dirige vos activités. En outre, Il sert parfois Lui-même votre famille en tant que messager ou domestique, ce qui signifie qu'Il agit comme le ferait un serviteur ordinaire. Ceux qui cherchent à gagner la faveur du Seigneur obtiennent très facilement de Lui la libération, mais il n'accorde pas aisément la bénédiction de pouvoir Le servir directement.

Alors qu'il instruisait Maharaja Pariksit, Sukadeva Gosvami jugea sage de l'encourager, car il se pouvait que le roi songe à la prestigieuse position de différentes dynasties royales. Particulièrement glorieuse entre toutes est celle de Priyavrata au sein de laquelle apparut le Seigneur Suprême en tant que Sri Rsabhadeva. De même, la famille d'Uttanapada Maharaja, le père de Maharaja Dhruva, fut également rendue glorieuse par la naissance du roi Prthu. Celle de Maharaja Raghu est célébrée pour avoir vu naître Sri Ramacandra. Quant aux dynasties Yadu et Kuru, elles ont existé à la même époque, mais la première est la plus glorieuse car Krsna y est apparu. Maharaja Pariksit aurait pu croire que la dynastie Kuru n'était pas aussi heureuse que les autres du fait que le Seigneur Suprême n'y était pas apparu, que ce soit en tant que Krsna, Ramacandra, Rsabhadeva ou Maharaja Prthu. Voilà pourquoi Sukadeva Gosvami encourage Pariksit Maharaja dans ce verset.

Dans un certain sens, la dynastie Kuru peut être considérée comme plus glorieuse que les autres du fait qu'elle a donné au monde des bhaktas aussi élevés que les cinq Pandavas, ces purs serviteurs du Seigneur. Bien que Krsna ne soit pas personnellement apparu dans la dynastie Kuru, Il Se sentait à tel point obligé envers les Pandavas du fait de leur dévotion qu'Il prit sur Lui de veiller aux besoins de leur famille et d'être leur maître spirituel. Ainsi, bien qu'ayant vu le jour dans la dynastie Yadu, Krsna témoigna plus d'affection aux Pandavas; par Ses Actes, Il prouva qu'Il penchait davantage en faveur de la dynastie Kuru que de la dynastie Yadu. De fait, Se sentant l'obligé des Pandavas à cause de leur service dévotionnel, Krsna agit comme leur messager, et Il les aida à triompher de toutes sortes de situations dangereuses. Maharaja Pariksit ne devait donc pas s'attrister de ce que Krsna n'était point né dans sa famille. Le Seigneur Souverain est toujours favorable à Ses purs dévots, et il ressort clairement de Ses Actes que la libération ne revêt pas une grande importance pour les bhaktas. Krsna accorde en effet la libération avec facilité, mais non la possibilité de devenir un dévot de Sa Personne (muktim dadati karhicit sma na bhakti-yogam). Directement ou indirectement, il est prouvé que le bhakti-yoga sert de fondement à la relation sublime qui nous unit au Seigneur Suprême; il dépasse de loin la libération. En outre, un pur dévot du Seigneur atteint automatiquement la mukti.

nityanubhuta-nija-labha-nivrtta-trsnah
sreyasy atad-racanaya cira-supta-buddheh
lokasya yah karunayabhayam atma-lokam
akhyan namo bhagavate rsabhaya tasmai

Le Seigneur Souverain, Sri Rsabhadeva, avait parfaitement conscience de Sa véritable identité; aussi Se suffisait-Il à Lui-même et n'aspirait Il à aucune forme de satisfaction externe. Nul besoin pour Lui de rechercher une réussite quelconque, puisqu'il Se trouvait déjà comblé en Lui-même. Ceux qui s'absorbent vainement en des concepts fondés sur le corps et qui créent autour d'eux une atmosphère de matérialisme restent toujours ignorants de leur véritable intérêt. Dans Son indicible miséricorde, Sri Rsabhadeva enseigna la connaissance de l'identité réelle de l'être ainsi que du but de l'existence. Nous offrons donc notre hommage respectueux au Seigneur, apparu sous les traits de Sri Rsabhadeva.

Voici un résumé de ce chapitre relatant l'histoire de Sri Rsabhadeva. Puisqu' Il est Dieu en personne, Sri Rsabhadeva est complet en Lui-même; quant à nous, les êtres distincts, nous devrions, en tant que parcelles du Seigneur Suprême, suivre Ses instructions pour devenir nous aussi autonomes et satisfaits en nous-mêmes. Nous ne devrions pas, sous l'effet d'une conception corporelle de l'existence, nous créer des besoins inutiles. Celui qui réalise son identité spirituelle est pleinement satisfait du fait qu'il a retrouvé sa position spirituelle originelle. Ainsi que le confirme la Bhagavad-gita (XVIII.54): brahma-bhutah prasannatma na socati na kanksati -tel est le but véritable de tous les êtres. Même si nous vivons en ce monde matériel, nous pouvons devenir pleinement satisfaits et dénués de toute aspiration comme de toute affliction simplement en suivant les instructions du Seigneur ainsi que les énoncent la Bhagavad-gita ou le Srimad-Bhagavatam. La satisfaction ainsi obtenue par la réalisation de notre identité spirituelle a pour nom svarupananda. L'âme conditionnée, éternellement dans les ténèbres, n'entend rien à son véritable intérêt; elle cherche, à travers différents ajustements matériels, un bonheur impossible. C'est pourquoi le Srimad-Bhagavatam enseigne: na te viduh svartha-gatim hi visnum -subjuguée par une ignorance grossière, l'âme conditionnée ne sait pas que son intérêt véritable consiste à se réfugier aux pieds pareils-au-lotus de Visnu. Il ne sert à rien de rechercher le bonheur en s'efforçant d'améliorer sa situation matérielle, car ce n'est pas ainsi qu'on le trouvera. Par Ses instructions et Son exemple personnel, Sri Rsabhadeva éclaira les âmes conditionnées et leur montra comment trouver satisfaction en elles-mêmes en assumant leur identité spirituelle.

Ainsi s'achèvent les enseignements de Bhaktivedanta sur le sixième chapitre du cinquième Chant du Srimad-Bhagavatam, intitulé: "L'histoire de Sri Rsabhadeva".

Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare