SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 5
CHAPITRE 9

L'histoire de Jada Bharata.

VERSET 16

atha vrsala-raja-panih purusa-pasor asrg-asavena devim bhadra-kalim
yaksyamanas tad-abhimantritam asim ati-karala-nisitam upadade.

TRADUCTION

A ce moment, un des brigands remplissant les fonctions de grand sacrificateur s'apprêta à offrir à la déesse Kali le sang de Jada Bharata -qu'il prenait pour un homme-animal- pour qu'elle s'en délecte comme d'une liqueur. Il prit un sabre d'aspect redoutable au tranchant bien acéré, et le consacrant au moyen du mantra de Bhadra Kali, le leva pour décapiter Jada Bharata.

VERSET 17

iti tesam vrsalanam rajas-tamah-prakrtinam dhana-mada-raja-
utsikta-manasam bhagavat-kala-vira-kulam kadarthi-krtyotpathena
svairam viharatam himsa-viharanam karmati-darunam yad brahma-
bhutasya saksad brahmarsi-sutasya nirvairasya sarva-bhuta-suhrdah
sunayam apy ananumatam alambhanam tad upalabhya brahma-
tejasati-durvisahena dandahyamanena vapusa sahasoccacata saiva devi
bhadra-kali.

TRADUCTION

Tous les malfaiteurs qui avaient participé à l'organisation de ce sacrifice destiné à la déesse Kali étaient de vile mentalité et enchaînés parla passion et l'ignorance. Débordants de cupidité, ils osaient désobéir aux ordres des Vedas ens'apprêtant à tuer Jada Bharata, lui qui était une âme réalisée issue d'une famille de brahmanas. Dans leur perversité, ces brigands l'avaient amené devant la déesse Kali pour le lui sacrifier. De tels individus se consacrent toujours à des oeuvres mauvaises, et c'est ainsi qu'ils osèrent lever la main sur Jada Bharata, lui qui était le meilleur ami de tous les êtres. Cet homme n'éprouvait de haine à l'égard de personne et il s'abîmait sans cesse dans une méditation sur le Seigneur Souverain. En outre, son père comptait parmi les brahmanas éprouvés. Le tuer était strictement interdit, même s'il avait été un ennemi ou un individu belliqueux. Quoi qu'il en soit, il n'y avait aucune raison de tuer Jada Bharata, et la déesse Kali ne pouvait supporter que soit accompli un tel geste. Elle comprit immédiatement que les brigands impies s'apprêtaient à mettre à mort un grand dévot du Seigneur. Soudain, le corps de la murti se brisa en deux, et la déesse Kali en personne en sortit, le corps brûlant d'un éclat si intense qu'il en était insoutenable.

TENEUR ET PORTEE

Selon les prescriptions védiques, seul un agresseur peut être mis à mort. Si quelqu'un s'approche de nous dans l'intention manifeste de nous tuer, nous pouvons aussitôt réagir et le tuer pour assurer notre propre défense. Les Ecritures enseignent également qu'il est permis de tuer une personne qui vient violenter ou enlever notre femme, ou encore qui vient incendier notre maison. Sri Ramacandra fit périr toute la famille de Ravana parce que ce dernier avait enlevé Son épouse, Sitadevi. Il convient toutefois de noter que le fait de tuer n'est pas sanctionné dans les sastras pour d'autres raisons. Les sacrifices d'animaux offerts aux devas -qui sont des émanations du Seigneur Suprême- sont permis à ceux qui mangent de la viande, mais il faut bien comprendre que ces sacrifices servent à restreindre la consommation de chair animale. En d'autres termes, les Vedas réglementent également l'abattage des animaux. Compte tenu de ces points, il n'y avait aucune raison de tuer Jada Bharata, lui qui était issu d'une famille de brahmanas respectable et éminents. C'était une âme consciente de Dieu et un bienfaiteur de tous les êtres. Le meurtre de Jada Bharata par ces brigands n'était nullement sanctionné par les Vedas. Il en résulta que la déesse Bhadra Kali elle-même sortit de la murti pour protéger ce dévot du Seigneur. Srila Visvanatha Cakravarti Thakura explique que c'est en raison du rayonnement spirituel émanant d'un bhakta comme Jada Bharata que la murti se fendit en deux. Seuls des malfaiteurs sous l'influence de la passion et de l'ignorance, rendus fous par l'opulence matérielle, peuvent offrir un homme en sacrifice à la déesse Kali, car un acte de cette nature n'est nullement approuvé par les Vedas. Il existe à l'heure actuelle des centaines et des milliers d'abattoirs à travers le monde, entretenus par une population infatuée d'elle-même et folle de richesses matérielles, mais les enseignements de l'école bhagavata ne sont jamais en faveur de ce genre d'activités.

VERSET 18

bhrsam amarsa-rosavesa-rabhasa-vilasita-bhru-kuti-vitapa-kutila-
damstraruneksanatopati-bhayanaka-vadana hantu-kamevedam
mahatta-hasam ati-samrambhena vimuncanti tata utpatya papiyasam
dustanam tenaivasina vivrkna-sirsnam galat sravantam asrg-asavam
atyusnam saha ganena nipiyati-pana-mada-vihvaloccaistaram sva-
parsadaih saha jagau nanarta ca vijahara ca sirah-kanduka-lilaya.

TRADUCTION

Ne pouvant tolérer les offenses commises, la déesse Kali en furie, jetait des regards flamboyants de ses yeux rouges et découvrait ses redoutables dents incurvées. Elle avait un aspect des plus terrifiants; on aurait dit qu'elle s'apprêtait ainsi à détruire toute la création. D'un bond elle descendit de l'autel et décapita sur-le-champ tous les brigands avec le sabre même qu'ils comptaient utiliser pour tuer Jada Bharata. Puis elle se mit à boire le sang chaud qui s'échappait de leurs cous, comme si ce sang avait été une boisson enivrante, imitée par les sorcières et les démones qui formaient sa suite. Grisées par le sang, elles se mirent toutes à chanter d'une voix forte et à danser comme si elles étaient sur le point d'anéantir l'univers entier, tout en jouant au ballon avec les têtes des malfaiteurs.

TENEUR ET PORTEE

Il ressort à l'évidence de ce verset que la déesse Kali (Durga) ne favorise pas du tout ses dévots. Sa tâche consiste à châtier et à tuer les êtres démoniaques, et c'est ainsi qu'elle décapite de nombreux démons, brigands et autres éléments indésirables de la société. Les gens sans intelligence qui font fi de la Conscience de Krsna cherchent à satisfaire la déesse en lui offrant toutes sortes de choses abominables, mais si ses adorateurs commettent la moindre erreur dans leur culte, la déesse finit par les punir en leur ôtant la vie. Les personnes démoniaques rendent un culte à Kali pour obtenir d'elle divers bienfaits matériels, mais les péchés dont elles se rendent coupables au nom de ce culte ne leur sont pas pardonnés. Les sacrifices d'hommes ou d'animaux devant une murti sont tout particulièrement interdits.

VERSET 19

evam eva khalu mahad-abhicarati-kramah kartsnyenatmane phalati.

TRADUCTION

Lorsqu'un être mauvais commet une offense envers une importante personnalité, sa faute retombe toujours sur lui-même, comme ce fut ici le cas.

VERSET 20

na va etad visnudatta mahad-adbhutam yad asambhramah sva-siras-
chedana apatite pi vimukta-dehady-atma-bhava-sudrdha-hrdaya-
granthinam sarva-sattva-suhrd-atmanam nirvairanam saksad
bhagavatanimisari-varayudhenapramattena tais tair bhavaih
pariraksyamananam tat-pada-mulam akutascid-bhayam upasrtanam
bhagavata-paramahamsanam.

TRADUCTION

(Sukadeva Gosvami dit alors à Maharaja Pariksit:)
O Visnudatta, ceux qui savent déjà que l'âme est distincte du corps, qui sont libérés du noeud implacable du coeur, qui toujours agissent pour le bien de tous les êtres et jamais n'envisagent de faire le moindre mal à qui que ce soit, ceux-là jouissent toujours de la protection de Dieu, la Personne Suprême, qui porte Son disque [le sudarsana-cakra] et agit comme le temps suprême pour faire périr les asuras et protéger Ses dévots. Les bhaktas se réfugient toujours aux pieds pareils-au-lotus du Seigneur, si bien qu'ils restent sereins en toutes circonstances, même s'ils s'attendent à être décapités. Pour eux, il n'y a là rien d'étonnant.

TENEUR ET PORTEE

Ce sont là quelques-unes des qualités sublimes d'un pur dévot de Dieu, la Personne Suprême. Tout d'abord, un bhakta reste fermement convaincu de son identité spirituelle; jamais il ne s'identifie au corps. Il possède la ferme conviction que l'âme spirituelle se distingue du corps. Par suite, il ne craint rien ; même si sa vie est menacée, il n'éprouve pas la moindre peur. Il ne traite même pas un ennemi comme tel. Voilà quelles sont les qualités d'un bhakta. Il s'en remet toujours entièrement à Dieu, la Personne Suprême, et le Seigneur, pour Sa part, Se montre toujours très désireux de le protéger en toute circonstances.

Ainsi s'achèvent les enseignements de Bhaktivedanta sur le neuvième chapitre du cinquième Chant du Srimad-Bhagavatam, intitulé: ''L'histoire de Jada Bharata".


Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare