SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 7
CHAPITRE 14

La vie de famille idéale.

VERSET 6

jnatayah pitarau putra
bhratarah suhrdo pare
yad vadanti yad icchanti
canumodeta nirmamah

TRADUCTION

L'homme intelligent doit organiser sa vie de façon très simple. Si ses amis, ses enfants, ses parents, ses frères ou qui que ce soit d'autre lui font des suggestions sur la façon dont il devrait vivre, il doit extérieurement se montrer d'accord avec eux en disant: "Oui, cela est très bien", mais intérieurement il doit être résolu à ne pas se créer une vie de complications l'éloignant du but de l'existence.

VERSET 7

divyam bhaumam cantariksam
vittam acyuta-nirmitam
tat sarvam upayunjana
etat kuryat svato budhah

TRADUCTION

Il faut utiliser les produits naturels créés par Dieu, la Personne Suprême, pour subvenir aux besoins du corps et de l'âme de tous les êtres. Les nécessités vitales sont de trois ordres: celles qui viennent du ciel [par la pluie], celles qui viennent de la terre [des mines, des champs ou des mers], et celles qui viennent de l'atmosphère [qui sont obtenues de façon soudaine et inattendue].

TENEUR ET PORTEE

Les êtres vivants, revêtus de différents corps, sont tous des enfants de Dieu, la Personne Suprême, ainsi que le confirme le Seigneur dans la Bhagavad-gita (14.4):

sarva-yonisu kaunteya
murtayah sambhavanti yah
tasam brahma mahad-yonir
aham bija-pradah pita

''Comprends cela, ô fils de Kunti, que toutes les espèces vivantes procèdent du sein de la nature matérielle, et que J'en suis le père, qui donne la semence." Le Seigneur Suprême, Krsna, est le père de tous les êtres, quel que soit leur espèce ou leur corps. L'homme intelligent peut voir que tous les êtres, appartenant aux huit millions quatre cent mille (8 400 000) espèces vivantes, font partie de Dieu, la Personne Suprême, et sont Ses fils. Tout ce qui se trouve dans l'univers matériel et dans le monde spirituel appartient au Seigneur Suprême (isavasyam idam sarvam), si bien que tout est relié à Lui. Srila Rupa Gosvami dit à ce propos:

prapancikataya buddhya
hari-sambandhi-vastunah
mumuksubhih parityago
vairagyam phalgu kathyate

"Imparfait est le renoncement de qui rejette quoi que ce soit sans considérer comment cela est relié à Krsna." (B.r.s.,1.2.256) Bien que les philosophes mayavadis prétendent que la création matérielle n'a pas d'existence comme telle, cela n'est pas vrai; elle existe bel et bien, mais l'idée que tout appartient à la société humaine est fausse, illusoire. Tout appartient à Dieu, la Personne Suprême, car tout a été créé par Lui. Tous les êtres vivants, en tant que Ses fils, fragments éternels de Sa Personne, ont le droit d'utiliser les biens de leur père selon les lois de la nature. Les Upanisads expliquent à ce sujet: tena tyaktena bhunjitha ma grdhah kasya svid dhanam. Chacun devrait être satisfait de ce qui lui est accordé par le Seigneur Souverain, et personne ne devrait empiéter sur les droits ou la propriété d'autrui.
La Bhagavad-gita enseigne:

annad bhavanti bhutani
parjanyad anna-sambhavah
yajnad bhavati parjanyo
yajnah karma-samudbhavah

"Le corps de tout être subsiste grâce aux céréales dont les pluies permettent la croissance. Et les pluies coulent du yajna, le sacrifice qu'accomplit l'homme en s'acquittant des devoirs qui lui sont prescrits." (B.g.,3.14) Lorsque les céréales sont produites en quantités suffisantes, les hommes et les animaux peuvent se nourrir sans difficultés. Tel est l'arrangement de la nature. Prakrteh kriyamanani gunaih karmani sarvasah. Tous les êtres agissent sous l'influence de l'énergie matérielle, et seuls les sots croient qu'ils peuvent améliorer ce que Dieu a créé. Les chefs de famille sont tout particulièrement responsables de veiller à ce que les lois de Dieu soient respectées, sans que les hommes, les communautés, les sociétés ou les nations se combattent les uns les autres. La société humaine doit utiliser convenablement les dons de Dieu, particulièrement les céréales qui poussent grâce à la pluie tombée du ciel. Et comme l'enseigne la Bhagavad-gita: yajnad bhavati parjanyah -pour que la pluie tombe régulièrement, l'humanité doit accomplir des sacrifices (yajnas). Autrefois, les yajnas consistaient en des offrandes de ghi et de céréales, mais de nos jours il va sans dire que cela n'est plus possible, car la production de ghi et de céréales a diminué du fait des péchés de l'homme. Cependant, les gens devraient adopter la conscience de Krsna et chanter le mantra Hare Krsna, tel que le recommandent les sastras (yajnaih sankirtana-prayair yajanti hi sumedhasah). Si partout dans le monde les gens se joignent au Mouvement pour la Conscience de Krsna et chantent les gloires et les Noms spirituels de Dieu, ce qui ne présente aucune difficulté, il ne manquera pas de pluie; par voie de conséquence, céréales, fruits et fleurs pousseront à profusion et toutes les nécessités vitales seront facilement obtenues. Les grhasthas, les chefs de famille, doivent prendre la responsabilité d'organiser cette production naturelle. C'est pourquoi il est écrit: tasyaiva hetoh prayateta kovidah. L'homme intelligent doit s'efforcer de répandre la Conscience de Krsna grâce au chant des Saints Noms du Seigneur, et toutes les nécessités vitales viendront alors automatiquement.

VERSET 8

yavad bhriyeta jatharam
tavat svatvam hi dehinam
adhikam yo bhimanyeta
sa steno dandam arhati

TRADUCTION

On peut prétendre à la possession de ce qui est nécessaire pour répondre aux besoins essentiels du corps, mais quiconque désire posséder davantage doit être considéré comme un voleur et mérite d'être puni par les lois de la nature.

TENEUR ET PORTEE

Par la grâce de Dieu, nous obtenons parfois de grandes quantités de nourriture, ou nous recevons de façon soudaine une contribution quelconque, ou encore nous faisons un gain inespéré en affaires. Il se peut ainsi que nous obtenions davantage d'argent que nous en avons besoin. Comment faut-il dépenser cet argent? Doit-on l'accumuler à la banque à seule fin d'augmenter ses économies? Non, à quoi bon! D'ailleurs, la Bhagavad-gita (16.13) qualifie une telle mentalité de démoniaque, digne d'un asura:

idam adya maya labdham
imam prapsye manoratham
idam astidam api me
bhavisyati punar dhanam

Telle est la pensée de l'homme démoniaque: "Tant de richesses sont aujourd'hui miennes et par mes plans, davantage encore viendront. Je possède aujourd'hui tant de choses, et demain plus et plus encore!" L'asura se préoccupe de la quantité d'argent qu'il a aujourd'hui en banque et de la façon dont il l'accroîtra demain, mais l'accumulation effrénée des richesses n'est permise ni par les sastras ni, à l'époque actuelle, par le gouvernement. En fait, si quelqu'un possède plus que ce dont il a besoin pour sa subsistance, il doit le dépenser pour Krsna. Selon la civilisation védique, tout surplus doit être donné au Mouvement pour la Conscience de Krsna, ainsi que l'ordonne le Seigneur en personne dans la Bhagavad-gita (9.27):

yat karosi yad asnasi
yaj juhosi dadasi yat
yat tapasyasi kaunteya
tat kurusva mad-arpanam

"Quoi que tu fasses, que tu manges, que tu sacrifies et prodigues, quelque austérité que tu pratiques, que ce soit pour Me l'offrir, ô fils de Kunti." Les grhasthas ne doivent dépenser l'argent qu'ils ont en surplus que pour le Mouvement pour la Conscience de Krsna.

Ils peuvent ainsi faire des contributions qui serviront à construire des temples pour le Seigneur Suprême ou à répandre les enseignements de la Srimad-Bhagavad-gita, c'est-à-dire de la Conscience de Krsna, partout dans le monde. Srnvan bhagavato bhiksnam avatara-kathamrtam: les sastras -les Puranas et les autres Ecrits védiques- contiennent de très nombreux récits décrivant les Activités transcendantales du Seigneur Souverain, et chacun devrait les entendre de façon assidue. Pour donner un exemple, si nous lisons chaque jour toute la Bhagavad-gita, les dix-huit chapitres, chaque lecture nous procurera de nouvelles réalisations. Telle est la nature d'un texte transcendantal. Le Mouvement pour la Conscience de Krsna fournit donc à chacun une occasion de dépenser son surplus de revenus pour le bien de l'humanité tout entière en favorisant la propagation de la Conscience de Krsna. En Inde, tout particulièrement, nous pouvons voir des centaines et des milliers de temples ayant été construits par des hommes riches qui ne voulaient pas agir en voleurs et être punis.

Le présent verset revêt une très grande importance. Tel qu'expliqué ici, celui qui accumule plus d'argent que nécessaire est un voleur, et selon les lois de la nature il devra être puni. Une personne qui gagne plus d'argent que nécessaire devient désireuse de jouir du confort matériel de plus en plus. Les matérialistes inventent toutes sortes de faux besoins, et ceux qui ont de l'argent, illusionnés par ces besoins artificiels, s'efforcent d'en accumuler davantage afin d'accroître toujours plus leurs possessions. C'est là la clé du développement économique moderne. Chacun est occupé à gagner de l'argent, et cet argent est gardé à la banque, qui à son tour offre de l'argent aux gens. Dans ce cycle d'activités, tous ne pensent qu'à obtenir de plus en plus d'argent, si bien que le but ultime de la vie humaine se trouve oublié. En deux mots, nous pouvons dire que tout le monde est un voleur et mérite d'être châtié. Or, le châtiment de la nature s'exerce dans le cycle des morts et des renaissances. Nul ne meurt pleinement satisfait d'avoir assouvi ses désirs matériels, car cela n'est pas possible. C'est pourquoi ceux qui vont mourir sont profondément affligés, incapables qu'ils sont de combler leurs désirs. Les lois de la nature leur procurent ensuite un autre corps pour leur permettre de satisfaire leurs désirs inassouvis, et en naissant de nouveau, en acceptant un nouveau corps matériel, ils s'exposent volontairement aux trois formes de souffrance qui caractérisent l'existence en ce monde.

VERSET 9

mrgostra-khara-markakhu-
sarisrp khaga-maksikah
atmanah putravat pasyet
tair esam antaram kiyat

TRADUCTION

Chacun devrait traiter les animaux tels le cerf, le chameau, l'âne, le singe, la souris, le serpent, l'oiseau et la mouche comme ses propres fils. Combien minime est en effet la différence entre les enfants et ces innocentes bêtes!

TENEUR ET PORTEE

L'être conscient de Krsna comprend qu'il n'existe pas de différence entre les animaux et les enfants innocents vivant sous son toit. Même chez les hommes ordinaires, nous voyons que les chiens et les chats domestiques sont considérés au même titre que les enfants, sans malveillance aucune. Comme les enfants, les animaux dépourvus d'intelligence comptent également parmi les fils du Seigneur Suprême, de Dieu, et pour cette raison une personne consciente de Krsna, même s'il s'agit d'un chef de famille, ne doit pas faire de discrimination entre les pauvres bêtes et ses enfants. Malheureusement, la société moderne a inventé toutes sortes de manières de tuer les animaux appartenant à différentes espèces. Dans les champs cultivés, par exemple, il y a beaucoup de souris, d'insectes et d'autres créatures susceptibles de nuire à la production, et on les extermine parfois au moyen de pesticides. Ce verset interdit cependant une telle tuerie. Chaque être vivant doit être nourri grâce aux aliments que le Seigneur Souverain met à sa disposition. L'homme ne doit pas se considérer comme le seul ayant droit aux biens de Dieu; au contraire, il doit comprendre que tous les autres animaux de la création ont également droit de jouissance sur la propriété de Dieu. Notre verset parle même du serpent, indiquant que le chef de famille ne doit pas même montrer de malveillance envers un serpent. Si chacun est parfaitement satisfait en se nourrissant des dons du Seigneur, pourquoi devrait-il y avoir de l'envie, de la haine entre les êtres? De nos jours, la société penche fortement vers l'idéologie communiste, mais nous ne croyons pas qu'il puisse exister une meilleure forme de communisme que celle qui est exposée dans le présent verset du Srimad-Bhagavatam. Même dans les pays communistes, on tue les pauvres bêtes sans aucune considération, bien qu'une part de nourriture leur revienne aussi de droit.

VERSET 10

tri-vargam natikrcchrena
bhajeta grha-medhy api
yatha-desam yatha-kalam
yavad-daivopapaditam

TRADUCTION

Même si quelqu'un est un chef de famille plutôt qu'un brahmacari, un sannyasi ou un vanaprastha, il ne doit pas se donner trop de peine en vue d'atteindre à la piété, à la richesse ou à la satisfaction de ses sens. Même dans la vie de famille, il faut se contenter de subvenir aux besoins essentiels du corps avec ce qu'un minimum d'efforts permet d'obtenir, selon le temps et le lieu, par la grâce du Seigneur. Il ne faut pas se livrer à l'ugra-karma.

TENEUR ET PORTEE

Il existe quatre objectifs à atteindre pour l'être humain: dharma, artha, kama et moksa (la piété, le développement économique, la satisfaction des sens et la libération). Il faut d'abord se montrer pieux, en respectant divers principes et règles, puis gagner de l'argent destiné à assurer l'entretien de sa famille et la satisfaction de ses sens. La cérémonie la plus importante en vue de la satisfaction des sens est le mariage, car les rapports charnels comptent parmi les principaux besoins du corps matériel. Yan maithunadi-grhamedhi-sukham hi tuccham. Bien que les rapports sexuels ne soient pas une nécessité très noble, les hommes comme les animaux ont besoin d'une certaine quantité de plaisir à cause de leurs tendances matérielles. Or, il faut se contenter de la vie conjugale et ne pas dépenser d'énergie hors de ce cadre en vue de jouissances ou de rapports charnels supplémentaires.

En ce qui concerne le développement économique, la responsabilité en revient surtout aux vaisyas et aux grhasthas. La société doit être divisée en varnas et asramas -brahmanas, ksatriyas, vaisyas, sudras, brahmacarya, grhastha, vanaprastha et sannyasa. La prospérité économique est une nécessité pour les grhasthas. Les grhasthas brahmanas devraient être satisfaits en vivant suivant les principes de l'adhyayana, de l'adhyapana, du yajana et du yajana -c'est à-dire qu'ils doivent devenir des érudits, enseigner à d'autres comment devenir eux-mêmes des érudits, apprendre comment rendre un culte au Seigneur Souverain, Sri Visnu, et enseigner à autrui ce même culte, ou même celui des devas. Le brahmana doit exercer ses activités sans être rémunéré, mais il peut accepter la charité d'une personne à qui il enseigne comment vivre en être humain. Quant aux ksatriyas, ils sont censés régner sur les terres, lesquelles devraient être réparties entre les vaisyas pour qu'ils les cultivent, protègent les vaches et fassent du commerce. Les sudras, eux, doivent travailler; ils exerceront le métier de fabricant de tissu, de tisserand, de forgeron, d'orfèvre, etc., ou ils assumeront les travaux fatigants permettant la production des céréales.

Telles sont les différentes catégories d'occupations qui doivent permettre à l'homme d'assurer sa subsistance, et la société devrait ainsi rester simple. De nos jours, cependant, tous poursuivent le progrès technologique, ce que la Bhagavad-gita désigne par le mot ugra-karma, signifiant "un travail extrêmement pénible". C'est cet ugra-karma qui est à l'origine de l'agitation qui trouble aujourd'hui l'esprit des hommes. L'homme se livre à toutes sort d'activités pécheresses et se dégrade en ouvrant des abattoirs, des débits de boissons et des fabriques de cigarettes, de même que des boîtes de nuit et autres établissements destinés au plaisir des sens. De cette façon, ils ruinent leur vie. Naturellement, des chefs de famille sont impliqués dans toutes ces activités, et c'est pourquoi notre verset dit, à travers l'usage du mot api, que même si l'on est un chef de famille, on ne doit pas se livrer à des tâches trop pénibles. Il faut apprendre à gagner sa vie de façon extrêmement simple. Quant à ceux qui ne sont pas des grhasthas -les brahmacaris, les vanaprasthas et les sannyasis-, ils n'ont rien d'autre à faire que de s'efforcer de progresser dans la vie spirituelle. Cela signifie que les trois quarts de la population du globe doivent mettre un terme à la poursuite des plaisirs sensoriels et se consacrer entièrement au développement de la conscience de Krsna. Un quart seulement de la population doit être grhastha, et ce, en accord avec les lois restreignant les plaisirs des sens. Les grhasthas, les vanaprasthas, les brahmacaris et les sannyasis doivent s'efforcer ensemble, avec leur énergie commune, de devenir conscients de Krsna. Cette forme de civilisation porte le nom de daiva-varnasrama. L'un des objectifs du Mouvement pour la Conscience de Krsna est d'établir ce daiva-varnasrama, mais certes pas d'encourager un prétendu varnasrama n'assurant pas une répartition scientifique des tâches da la société.


Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare