SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 7
CHAPITRE 15

Instructions destinées
aux êtres humains civilisés.

VERSET 1

sri-narada uvaca
karma-nistha dvijah kecit
tapo-nistha nrpapare
svadhyaye nye pravacane
kecana jnana yogayoh

TRADUCTION

Narada Muni poursuivit:
O roi, certains brahmanas sont très attachés aux activités intéressées, d'autres aux pratiques austères et à l'ascèse; d'autres encore étudient les Ecritures védiques, tandis que quelques-uns, bien qu'en très petit nombre, développent leur savoir et pratiquent différents yogas, en particulier le bhakti-yoga.

VERSET 2

jnana-nisthaya deyani
kavyany anantyam icchata
daive ca tad-abhave syad
itarebhyo yatharhatah

TRADUCTION

Une personne qui désire délivrer ses ancêtres ou se libérer elle-même, doit faire la charité à un brahmana adepte du monisme impersonnel (jnana-nistha). En l'absence d'un tel brahmana avancé, on peut faire l'aumône à un brahmana qui s'adonne aux activités intéressées [karma-kanda].

TENEUR ET PORTEE

Il y a deux méthodes pour se libérer de l'asservissement à la matière. L'une met en jeu le jnana-kanda et le karma-kanda, et l'autre l'upasana-kanda. Les vaisnavas ne veulent jamais se fondre dans l'existence du Suprême, mais désirent plutôt être les serviteurs éternels du Seigneur et Lui offrir un service fondé sur l'amour. Dans ce verset, les mots anantyam icchata se rapportent aux personnes qui désirent s'affranchir de l'asservissement matériel et se fondre dans l'existence du Seigneur. Cependant, les bhaktas, dont l'objectif est d'obtenir la compagnie personnelle du Seigneur, ne désirent pas adopter les activités liées au karma-kanda ou au jnana-kanda, car le service de dévotion pur se situe à un niveau supérieur. Anyabhilasita-sunyam jnana-karmady-anavrtam. Le pur service de dévotion ne comporte pas la moindre trace de jnana ou de karma. En conséquence, lorsque les vaisnavas font des dons charitables, ils n'ont pas à chercher un brahmana agissant dans le cadre du jnana-kanda ou du karma-kanda. Le meilleur exemple à cet égard nous est donné par Advaita Gosvami, qui, après avoir accompli la cérémonie du sraddha en l'honneur de son père, offrit l'aumône à Haridasa Thakura -quand tout le monde savait bien que ce dernier était issu d'une famille musulmane, non d'une famille de brahmanas, et qu'il ne s'intéressait pas aux activités relevant du jnana-kanda ou du karma-kanda.

On doit donc faire la charité aux spiritualistes de tout premier ordre, c'est-à-dire aux bhaktas, car les sastras recommandent:

muktanam api siddhanam
narayana-parayanah
sudurlabhah prasantatma
kotisv api maha-mune

"O grand sage, parmi les millions d'êtres libérés et parfaitement conscients de ce qu'est la libération, un peut-être sera un dévot de Narayana, ou Krsna. Ces bhaktas pleinement sereins sont extrêmement rares." (S.B.,6.14.5) Un vaisnava occupe une position supérieure à celle du jnani, et c'est pourquoi Advaita Acarya choisit Haridasa Thakura pour recevoir son aumône. Le Seigneur Suprême dit aussi:

na me bhaktas catur-vedi
mad-bhaktah sva-pacah priyah
tasmai deyam tato grahyam
sa ca pujyo yatha hy aham

'Même un très grand érudit versé dans les Ecritures védiques n'est pas reconnu comme Mon bhakta s'il n'offre pas un service de dévotion pur. Néanmoins, un pur bhakta ne désirant nullement prendre plaisir à des activités intéressées ou à la spéculation intellectuelle M'est très cher, même s'il est issu d'une famille de mangeurs de chiens. En fait, on doit lui témoigner le plus grand respect et accepter tout ce qu'il donne. De tels bhaktas sont aussi dignes d'adoration que Moi." (Hari-bhakti-vilasa,10.127) C'est ainsi qu'un bhakta, même s'il n'est pas issu d'une famille de brahmanas, est supérieur à tous les types de brahmanas, jnana-kandis ou karma-kandis du fait de sa dévotion pour le Seigneur.

A cet égard, on peut mentionner qu'à Vrndavana les brahmanas karma-kandis et jnana-kandis refusent parfois nos invitations à se rendre à notre temple, car celui-ci est connu sous le nom de temple angareji, ou "temple anglais". Néanmoins, conformément au témoignage des sastras et à l'exemple donné par Advaita Acarya, nous offrons du prasada aux bhaktas sans tenir compte de leurs origines indiennes, européennes ou américaines. La conclusion des sastras est qu'il vaut mieux nourrir un pur vaisnava, quel que soit l'endroit d'où il vient, que de nombreux brahmanas jnana-kandis ou karma-kandis. C'est ce que confirme la Bhagavad-gita (9.30):

api cet suduracaro
bhajate mam ananya-bhak
sadhur eva sa mantavyah
samyag vyavasito hi sah

"Commettrait-il les pires actes, il faut considérer quiconque pratique le service de dévotion comme un saint homme, car il est sur la voie parfaite." Il importe donc peu qu'un bhakta soit issu ou non d'une famille brahmana; s'il se consacre entièrement à Krsna, il s'agit alors d'un sadhu.

VERSET 3

dvau daive pitr-karye trin
ekaikam ubhayatra va
bhojayet susamrddho pi
sraddhe kuryan na vistaram

TRADUCTION

On ne devrait inviter que deux brahmanas pendant la période où l'on présente des offrandes aux devas, et trois durant la présentation d'offrandes aux ancêtres. Dans chacun de ces cas cependant, même un seul brahmana suffira. Même si l'on est très riche, il ne faut pas chercher à inviter plus de brahmanas ou à faire divers préparatifs coûteux à ces occasions.

TENEUR ET PORTEE

Comme nous l'avons déjà mentionné, Srila Advaita Acarya, lors de la cérémonie couramment célébrée où l'on présente des offrandes aux ancêtres, n'invita que Haridasa Thakura. Il se conformait ainsi au principe suivant: na me bhaktas catur-vedi mad-bhaktah sva-pacah priyah. Le Seigneur dit: "Il n'est pas nécessaire de devenir très versé en matière de connaissance védique pour devenir Mon dévot. On peut devenir un bhakta et M'être très cher même si l'on est issu d'une famille de mangeurs de chiens. C'est pourquoi les offrandes doivent être présentées à Mon dévot, et tout ce qu'il M'a offert doit être accepté." Suivant ce principe, on doit inviter un brahmana ou un vaisnava de premier ordre -c'est-à-dire une âme réalisée- et lui donner à manger lors de l'accomplissement de la cérémonie du sraddha et de la présentation des offrandes à ses ancêtres.

VERSET 4

desa-kalocita-sraddha-
dravya-patrarhanani ca
samyag bhavanti naitani
vistarat sva-janarpanat

TRADUCTION

Si l'on choisit de nourrir beaucoup de brahmanas ou de parents au cours de la cérémonie du sraddha, il y aura des désaccords sur le moment, l'endroit, la respectabilité et les ingrédients, la personne à vénérer et la manière de procéder au culte.

TENEUR ET PORTEE

Narada Muni a interdit de faire des préparatifs inutilement fastueux pour nourrir les parents ou les brahmanas durant la cérémonie du sraddha. Ceux qui possèdent de grandes richesses matérielles dépensent sans compter durant cette cérémonie. Les Indiens font des dépenses particulièrement considérables en trois occasions -pour la naissance d'un enfant, lors d'un mariage et à l'occasion de cérémonies du sraddha-, mais les sastras interdisent de faire des dépenses excessives pour inviter beaucoup de brahmanas et de proche, particulièrement au cours de la cérémonie du sraddha.

VERSET 5

dese kale ca samprapte
muny-annam hari-daivatam
sraddhaya vidhivat patre
nyastam kamadhug aksayam

TRADUCTION

Quand l'endroit et le moment sont favorables, on doit, avec amour, offrit à la murti du Seigneur Suprême des mets préparés dans du ghi, puis offrir le prasada à une personne appropriée -à un vaisnava ou un brahmana. Il en résultera une prospérité éternelle.


Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare