SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 7 CHAPITRE 2 Hiranyakasipu,
roi des asuras.
tatra ha preta-bandhunam
asrutya paridevitam aha tan balako bhutva yamah svayam upagatah
L'âme conditionnée est parfois contrainte de quitter un corps pour en revêtir un autre selon le verdict de Yamaraja. Toutefois, il lui est très difficile de s'incarner dans son nouveau corps tant que l'ancien n'a pas été anéanti par la crémation ou par quelque autre moyen. L'âme s'attache à son corps présent et refuse d'en revêtir un nouveau, si bien que dans l'intervalle, elle demeure sous la forme d'un spectre. Si un être ayant déjà quitté son corps a été vertueux au cours de sa vie, Yamaraja lui donne un autre corps pour le soulager. Or, comme l'être vivant dans le corps du roi était attaché à ce corps, il errait comme un fantôme, si bien que Yamaraja, faisant preuve d'une considération toute spéciale, se rendit auprès des proches de ce roi pour les instruire lui-même. Il prit pour cela l'aspect d'un enfant, car personne ne barre la route à un enfant; on le laisse entrer partout, même dans le palais d'un roi. En outre, cet enfant tenait des propos philosophiques, et les gens manifestent un vif intérêt pour les propos philosophiques lorsqu'ils sont énoncés par un enfant.
sri-yama uvaca
aho amisam vayasadhikanam vipasyatam loka-vidhim vimohah yatragatas tatra gatam manusyam svayam sadharma api socanty apartham
N'est-ce pas étonnant! Ces personnes, qui sont plus âgées que moi, savent très bien que des centaines et des milliers d'êtres vivants ont vu le jour et sont morts avant elles. Elles devraient donc comprendre qu'elles sont elles aussi susceptibles de mourir, et pourtant elles sont bouleversées. L'âme conditionnée vient d'un lieu inconnu où elle retourne après la mort. Il n'y a pas d'exception à cette règle imposée par la nature matérielle. Sachant cela, pourquoi toutes ces personnes s'affligent-elles en vain?
Le Seigneur déclare dans la Bhagavad-gita (2.28)
avyaktadini bhutani vyakta-madhyani bharata avyakta-nidhanany eva tatra ka paridevana "Tous les êtres créés sont, à l'origine, non manifestées; ils se manifestent dans leur état transitoire, et une fois anéantis, ils se retrouvent non manifestés. Aussi, à quoi bon s'en affliger?" Considérant qu'il existe deux sortes de philosophes -l'un croit à l'existence de l'âme et l'autre qui la nie-, on n'a aucune raison de s'affliger quelle que soit la vue philosophique à laquelle on souscrive. Ceux qui ne croient pas à l'existence de l'âme sont appelés athées par les tenants de la sagesse védique. Pourtant, même si aux seules fins de la discussion nous acceptons la théorie athée, il n'y a toujours pas de raison de s'affliger. Même si nous ne tenons pas compte de l'existence distincte de l'âme, il reste que les éléments matériels eux-mêmes étaient non manifestés avant la création. De cet état subtil est ensuite venu l'état manifesté, tout comme l'air est engendré par l'éther, le feu par l'air, l'eau par le feu et la terre par l'eau. La terre est elle-même à l'origine de nombreuses créations. Les gratte-ciel, par exemple, procèdent de la terre, et lorsqu'ils sont détruits, ils redeviennent non manifestés et n'existent plus à la fin que sous forme d'atomes. La loi de la conservation de l'énergie demeure; mais dans le cours du temps, les choses sont tantôt manifestées, tantôt non manifestées -là réside la différence. Pourquoi donc s'affliger, que ce soit lors de la phase manifestée ou non manifestée? D'une manière ou d'une autre, même à l'état non manifesté, rien n'est perdu. Au début comme à la fin, tous les éléments demeurent non manifestés, ce qui ne fait réellement aucune différence d'un point de vue matériel. Si nous acceptons les conclusions védiques, telles que la Bhagavad-gita les énonce (antavanta ime dehah) et selon lesquelles les corps matériels périssent tôt ou tard (nityasyoktah saririnah) tandis que l'âme, elle, est éternelle, alors nous devons toujours nous rappeler que le corps est comme un vêtement; qui s'apitoierait sur un changement de vêtement? Le corps matériel n'a pas d'existence tangible en relation avec l'âme éternelle: il tient en quelque sorte du rêve. Il se peut que dans un songe nous pensions voler dans le ciel ou nous déplacer sur un char comme un roi, mais au réveil nous constatons que nous ne sommes ni dans les airs ni sur un char royal. La sagesse védique encourage la réalisation spirituelle en s'appuyant sur la "non-existence" du corps matériel. C'est pourquoi, dans un cas comme dans l'autre, que l'on croie ou non à l'existence de l'âme, il n'y a aucune raison de s'affliger de la perte du corps. On trouve écrit dans le Mahabharata: adarsanad ihayatah punas cadarsanam gatah. Cette assertion pourrait servir d'appui à la théorie des hommes de science athées selon laquelle le foetus n'a pas de vie et n'est tout simplement qu'une masse de chair. Suivant cette théorie, si cette masse de chair dénuée de vie est retirée du ventre de la mère par une intervention chirurgicale appelée avortement, aucune vie n'est détruite; toujours selon cette théorie, le corps de l'enfant est comme une tumeur, et si l'on retire cette tumeur pour s'en débarrasser, aucune faute n'est commise. Le même argument pourrait être appliqué au roi et à ses reines: le corps du roi était devenu manifesté depuis une condition non manifestée, et de cet état il était retourné à la non-manifestation. Or puisque la manifestation n'existe qu'au stade intermédiaire -entre les deux phases de non-manifestation-, pourquoi devrait-on pleurer le corps manifesté dans l'intervalle?
aho vayam dhanyatama yad atra
tyaktah pitrbhyam na vicintayamah abhaksyamana abala vrkadibhih sa raksita raksati yo hi garbhe
La Bhagavad-gita (18.61) enseigne: isvarah sarva-bhutanam hrd-dese rjuna tisthati -le seigneur vit au plus profond du coeur de chacun. De là, Il accorde à tous Sa protection et donne à chaque être vivant les divers corps par l'intermédiaire desquels il veut jouir de la vie. Tout s'accomplit sous les directives de Dieu, la Personne Souveraine. En conséquence, on ne doit pas s'affliger à propos de la naissance ou de la mort d'un être, parce qu'elles ont été ordonnées par le Seigneur Suprême. Sri Krsna dit dans la la Bhagavad-gita (15.15): sarvasya caham hrdi sannivisto mattah smrtir jnanam apohanam ca "Je Me tiens dans le coeur de chaque être; de Moi viennent le souvenir, le savoir et l'oubli." Nous devons agir selon les directives que le Seigneur nous donne dans notre coeur; toutefois comme l'âme conditionnée désire agir de façon indépendante, le Seigneur lui accorde la possibilité d'agir à sa guise et de récolter le fruit de ses actes. Il enseigne Lui-même (B.g.,18.66): sarva-dharman parityajya mam ekam saranam vraja "Laisse là toute autre occupation et abandonne-toi simplement à Moi." Celui qui refuse de se plier aux ordres du Seigneur Suprême se voit accorder de pouvoir jouir de l'existence dans l'univers matériel. Plutôt que de refréner l'être conditionné, le Seigneur fournit à celui-ci l'occasion de jouir de la vie en ce monde, de telle sorte que, par une expérience éprouvée, il en vienne à comprendre après de très nombreuses renaissances (bahunam janmanam ante) que l'abandon aux pieds pareils-au-lotus de Vasudeva représente l'unique devoir de tous les êtres.
ya icchayesah srjatidam avyayo
ya eva raksaty avalumpate ca yah tasyabalah kridanam ahur isitus caracaram nigraha-sangrahe prabhuh
O faibles femmes! Ce n'est que par la volonté de Dieu la Personne Suprême, qui jamais n'est amoindri, que l'univers entier est créé, maintenu et à nouveau détruit; tel est le verdict des Vedas. Cette création matérielle, composée d'êtres mobiles et immobiles, est pour Lui exactement comme un jouet. En tant que le Seigneur Souverain, Il a tout pouvoir pour détruire ou protéger.
A ce propos, les reines auraient pu objecter: "Si notre époux était protégé par le Seigneur Suprême alors qu'il se trouvait dans le sein maternel, pourquoi n'a-t-il pas maintenant été protégé?" La réponse à cette question tient dans les mots: ya icchayesah srjatidam avyayo ya eva raksaty avalumpate ca yah. On ne peut discuter les oeuvres de Dieu; le Seigneur est entièrement libre, de telle sorte qu'Il peut protéger ou anéantir à Son gré. Il n'est pas notre serviteur, Il fait ce qui Lui plaît; c'est pourquoi Il est le Seigneur Suprême. Ce n'est à la requête de personne qu'Il crée l'univers matériel, et Il peut donc tout anéantir selon Son bon plaisir. Telle est Sa suprématie. Si l'on se demande pourquoi Il agit ainsi, la raison en est qu'Il est l'Etre Suprême. Personne ne peut contester Ses Activités. On peut encore demander quelle est la raison d'être de cette création et de cette destruction qui semblent relever d'une volonté mauvaise. La réponse sera que pour prouver Sa toute-puissance, le Seigneur peut faire tout ce qu'Il veut, et personne ne peut Lui demander des comptes. S'Il devait répondre de Ses actes devant nous et Se justifier pour ce qu'Il fait ou ne fait pas, Sa suprématie ne serait plus absolue.
pathi cyutam tisthati dista-raksitam
grhe sthitam tad-vihatam vinasyati jivaty anatho pi tad-iksito vane grhe bhigupto sya hato na jivati
Ce sont là des exemples de la suprématie du Seigneur. Nos projets en vue de protéger ou de détruire n'ont aucun effet, alors que tout ce à quoi Dieu pense se produit. Les exemples donnés dans ce verset sont concrets; tout le monde en a fait l'expérience, et il en existe de nombreux autres, tout aussi clairs. Prahlada Maharaja disait qu'un enfant dépend indubitablement de son père et de sa mère, mais qu'en dépit de leur présence, il peut être tourmenté de multiples manières. Parfois encore, malgré les soins d'un médecin compétent et l'administration de médicaments appropriés, un malade ne réussit pas à survivre. En conséquence, puisque tout dépend de la volonté de Dieu, la Personne Suprême, notre seul et unique devoir consiste à nous abandonner à Lui et à rechercher Sa protection.
Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare |