SRIMAD-BHAGAVATAM
CHANT 7
CHAPITRE 5

Prahlada Maharaja,
le saint fils d'Hiranyakasipu.

VERSET 16

aniyatam are vetram
asmakam ayasaskarah
kulangarasya durbuddhes
caturtho syodito damah

TRADUCTION

"Holà! Qu'on m'apporte un bâton! Ce Prahlada ternit notre nom et notre réputation. A cause de son intelligence pernicieuse, le voilà devenu le brandon de la dynastie des asuras. Maintenant il doit être traité d'après le dernier des quatre procédés diplomatiques.

TENEUR ET PORTEE

En matière de politique, lorsqu'une personne s'oppose au gouvernement, quatre moyens peuvent être utilisés pour la neutraliser: on peut lui donner l'ordre officiel de mettre fin à ses agissements, se la rendre favorable, lui offrir un poste ou, pour finir, avoir recours aux armes. Lorsque aucun autre argument n'est possible, on la punit. Dans le domaine de la logique, cette méthode porte le nom d'argumentum ad baculum. Ne parvenant pas à obtenir de Prahlada Maharaja qu'il leur révèle la cause de ses opinions contraires à celles de son père, les deux brahmanas par hérédité, Sanda et Amarka, firent chercher un bâton pour le châtier et satisfaire ainsi leur maître, Hiranyakasipu. Du fait que Prahlada était devenu un bhakta, ils considéraient son intelligence souillée et voyaient en lui le pire descendant de la famille des asuras. Comme on dit: "Là où l'ignorance passe pour une bénédiction, c'est folie qu'être sage." Dans une société ou une famille où tous sont des asuras, c'est assurément faire preuve de folie que de devenir un vaisnava. Aussi Prahlada Maharaja fut-il accusé d'avoir une intelligence dénaturée car il se trouvait parmi des asuras, y compris ses précepteurs, qui étaient censés être des brahmanas.

Les membres du Mouvement pour la Conscience de Krsna se trouvent dans une situation analogue à celle de Prahlada Maharaja. Quatre-vingt-dix-neuf pour cent de ceux qui composent la population mondiale sont athées et démoniaques, si bien que notre prédication, qui s'inspire fidèlement de celle de Prahlada Maharaja, se heurte toujours à de nombreux obstacles. C'est ainsi que les jeunes Américains qui ont tout sacrifié pour répandre la conscience de Krsna sont accusés d'appartenir à la CIA, leur seule faute étant d'être des dévots de Krsna. Et qui plus est, en Inde, les brahmanas par hérédité, qui prétendent qu'on ne peut devenir brahmana que si l'on est issu d'une famille de brahmanas, nous accusent de causer la perte de la religion hindoue. Il est bien entendu que l'on ne devient un brahmana que si l'on en possède les qualités; mais parce que nous éduquons les Européens et les Américains de manière à développer en eux ces qualités et que nous leur accordons le statut de brahmanas, nous sommes accusés de détruire la religion hindoue. Néanmoins, nous heurtant à ces difficultés ainsi qu'à bien d'autres, nous devons continuer à répandre le Mouvement pour la Conscience de Krsna avec une grande détermination, semblable à celle de Prahlada Maharaja. En effet, bien que Prahlada fût le fils de l'asura Hiranyakasipu, il ne craignit à aucun moment les châtiments de ces fils d'asura qui prétendaient au titre de brahmana en vertu du lignage.

VERSET 17

daiteya-candana-vane
jato yam kantaka-drumah
yan-mulonmula-parasor
visnor nalayito rbhakah

TRADUCTION

"Ce gredin de Prahlada est né comme un arbre épineux dans une forêt de santals. Pour abattre cette forêt, une hache est nécessaire, et le bois de l'arbre épineux convient tout à fait pour faire un manche à cette hache. Visnu représente la hache servant à couper le santal de la famille des asuras, et Prahlada en est le manche."

TENEUR ET PORTEE

Les arbres épineux croissent généralement dans des lieux déserts, et non pas dans les forêts de santals; mais les brahmanas par hérédité, Sanda et Amarka, comparaient la dynastie du Daitya Hiranyakasipu à une forêt de santals, et Prahlada Maharaja à un arbre vigoureux et épineux, dont le bois résistant pouvait servir de manche à une hache, celle-ci n'étant autre que Visnu Lui-même. Un fer de hache ne peut, à lui seul, abattre un arbre épineux; il doit être monté sur un manche, lequel peut être taillé dans le bois d'un arbre épineux. De la sorte, l'arbre épineux que représente la civilisation démoniaque peut être taillé en pièces par la hache de la visnu-bhakti, le service de dévotion offert à Sri Krsna. Certains membres de la civilisation démoniaque comme Prahlada Maharaja, peuvent devenir le manche de cette hache et aider ainsi Visnu à réduire en pièces la forêt tout entière de la civilisation démoniaque.

VERSET 18

iti tam vividhopayair
bhisayams tarjanadibhih
prahradam grahayam asa
tri-vargasyopapadanam

TRADUCTION

Sanda et Amarka, les précepteurs de Prahlada Maharaja, châtièrent et menacèrent leur élève de diverses façons, et entreprirent ensuite de l'instruire quant aux voies de la piété, de la poursuite des richesses et de la satisfaction des sens. Telle fut l'éducation qu'ils lui donnèrent.

TENEUR ET PORTEE

Dans ce verset, les mots prahradam grahayam asa sont particulièrement importants. L'expression grahayam asa signifie littéralement que les précepteurs de Prahlada Maharaja tentèrent d'inciter ce dernier à emprunter les voies du dharma, de l'artha et du kama (la piété, la poursuite des richesses et la satisfaction des sens). Ces trois buts retiennent généralement toute l'attention de l'homme, qui n'éprouve aucun intérêt pour la libération. Hiranyakasipu, le père de Prahlada Maharaja, ne s'intéressait qu'à l'or et aux plaisirs des sens. D'ailleurs, le mot hiranya signifie 'or" et kasipu indique un lit et des coussins moelleux, destinés à la satisfaction des sens. A l'opposé, le mot prahlada s'applique à une personne qui est toujours heureuse, établie dans la réalisation du Brahman (brahma-bhutah prasannatma). Prahlada est synonyme de prasannatma, qui signifie "toujours joyeux". L'adoration du Seigneur procurait à Prahlada une joie constante; mais conformément aux instructions d'Hiranyakasipu, ses précepteurs s'ingéniaient à lui enseigner des choses matérielles. Les gens à l'esprit matérialiste croient que la religion a pour but d'améliorer leurs conditions matérielles. C'est ainsi qu'ils vont au temple pour y adorer toutes sortes de devas, ceci à seule fin de recevoir d'eux quelques bénédictions susceptibles d'améliorer leur existence matérielle. Ils s'adressent également à des sadhus ou à des soi-disant svamis afin d'obtenir d'eux une méthode facile pour accéder à la prospérité matérielle. Au nom de la religion, ces prétendus sadhus s'efforcent de satisfaire les sens des matérialistes en leur indiquant des raccourcis pour connaître la réussite matérielle. A cette fin, ils leur remettent parfois un talisman ou leur confèrent une bénédiction. Parfois aussi, pour les attirer, il leur arrive de produire de l'or. Ils déclarent alors être eux-mêmes Dieu, et les insensés accourent vers eux pour accroître leurs richesses. Du fait de telles supercheries, certains se montrent réticents à opter pour une voie religieuse, et ils recommandent plutôt à la masse des hommes de travailler pour assurer leur progrès matériel. Voilà ce qui se passe partout dans le monde. Ce n'est pas d'aujourd'hui seulement, mais bien depuis des temps immémoriaux, qu'on se désintéresse de la libération (moksa). Il existe quatre principes d'action: la piété (dharma), le développement économique (artha), la satisfaction des sens (kama) et la libération (moksa). Les gens suivent une religion, la voie de la piété, afin d'acquérir des richesses matérielles. Et pourquoi désirent-ils ces richesses? Pour satisfaire leurs sens. Ainsi la masse des hommes préfère-t-elle ces trois voies (margas) propres à une vie matérialiste. Personne ne s'intéresse à la libération; or, la bhagavad-bhakti, le service de dévotion offert au Seigneur, se trouve au-delà même de la libération. En conséquence, la voie du service de dévotion, de la conscience de Krsna, est extrêmement difficile à saisir, ce que Prahlada Maharaja expliquera par la suite. Sanda et Amarka, ses précepteurs, cherchèrent donc à l'entraîner vers les voies du matérialisme, mais leur tentative se solda par un échec.

VERSET 19

tata enam gurur jnatva
jnata-jneya-catustayam
daityendram darsayam asa
matr-mrstam alankrtam

TRADUCTION

Au bout d'un certain temps, Sanda et Amarka estimèrent que Prahlada Maharaja était suffisamment instruit dans les voies diplomatiques qui consistent à se concilier les dirigeants, à les apaiser en leur donnant des postes lucratifs, à les diviser pour mieux les gouverner, et à les punir en cas de désobéissance. Un jour, après que sa mère l'eut personnellement lavé, joliment habillé et paré de nombreux ornements, ils amenèrent Prahlada devant son père.

TENEUR ET PORTEE

Il est essentiel pour un étudiant destiné à devenir dirigeant ou roi d'apprendre les quatre principes de la diplomatie. Il existe toujours une certaine rivalité entre un roi et ses sujets, et lorsqu'un citoyen agite l'opinion publique contre le roi, il incombe au souverain de le faire appeler et de chercher à se le concilier par de douces paroles, en lui disant par exemple: "Vous jouez un rôle majeur dans l'Etat. Pourquoi donc troubler le peuple et lui donner une nouvelle raison de s'agiter?" Si l'homme en question n'est pas apaisé par ces paroles, le roi doit alors lui offrir quelque poste lucratif -n'importe quel poste qui donne droit à un haut salaire- tel que celui de gouverneur ou de ministre, pour qu'il lui soit favorable. Si l'ennemi persiste à soulever le peuple, le roi doit chercher à créer la dissension dans le camp opposé, et si le coupable persiste encore dans ses méfaits, il doit avoir recours à la manière forte, celle de l'argumentum ad baculum, en le mettant en prison ou en le faisant passer par les armes. Les précepteurs choisis par Hiranyakasipu enseignaient donc à Prahlada Maharaja la façon de devenir un diplomate afin qu'il pût bien gouverner ses sujets.

VERSET 20

padayoh patitam balam
pratinandyasisasurah
parisvajya ciram dorbhyam
paramam apa nirvrtim

TRADUCTION

Lorsque Hiranyakasipu vit son fils à ses pieds, prosterné en signe de respect, il se mit aussitôt, en père affectueux, à le couvrir de bénédictions et à l'étreindre. Il est tout naturel pour un père de se sentir heureux lorsqu'il étreint son fils, et Hiranyakasipu éprouva donc une grande satisfaction.


Hare Krishna Hare Krishna Krishna Krishna Hare Hare
Hare Rama Hare Rama Rama Rama Hare Hare