vyakta-madhyani bharata
avyakta-nidhanany eva
tatra ka paridevana
Toutes choses créées sont, à l'origine, non manifestées; elles se manifestent dans leur état transitoire, et une fois dissoutes, se retrouvent non manifestées. A quoi bon s'en attrister, ô descendant de Bharata?
Il existe deux genres de philosophes: celui qui croit en l'existence de l'âme, et celui qui n'y croit pas; mais ni l'un ni l'autre n'ont de raisons pour se lamenter. Les hommes qui suivent les principes de la sagesse védique appellent "athées" ceux qui nient l'existence de l'âme. Or, supposons un instant que nous acceptions la philosophie athée; quelle raison pourrions nous avoir de nous plaindre? Avant la création, en l'absence de l'âme, les éléments matériels existent déjà, dans un état non manifesté. De cet état subtil provient plus tard l'état manifesté, de même que l'éther engendre l'air, l'air le feu, le feu l'eau, et l'eau la terre, qui, à son tour, fait naître tant de phénomènes. Prenons l'exemple d'un gratte-ciel, assemblage d'éléments terrestres, qu'on démolit: de manifesté qu'il était, il redevient non manifesté, pour finalement se décomposer en atomes. La loi de conservation de l'énergie continue d'agir; la seule différence est que les objets sont tantôt manifestés, tantôt non manifestés. Cependant, qu'ils soient dans l'un ou l'autre état, quelle raison de se lamenter pourrions-nous avoir? Même redevenus non manifestés, ils ne sont pas perdus! A l'origine comme à la fin, tout est non manifesté; la manifestation n'apparaît qu'au stade intermédiaire. Or, même matériellement parlant, cette différence n'a aucune importance réelle.
La conclusion de tous les Ecrits védiques, de la Bhagavad-gita en particulier, est que le corps matériel se détériore avec le temps, alors que l'âme demeure éternelle. Celui qui comprend cela doit se rappeler que le corps n'est qu'un vêtement, qu'il n'y a pas lieu de gémir sur un changement de vêtement. Devant l'éternité de l'âme, l'existence du corps passe comme un songe. Dans un rêve, nous pouvons croire que nous volons en plein ciel ou siégeons sur le char d'un roi, mais au réveil, nous devons revenir de nos illusions. La sagesse des Ecritures védiques nous encourage à la réalisation spirituelle en nous démontrant la précarité du corps matériel. Que l'on croie ou non en l'existence de l'âme, il n'y a nulle raison de se lamenter sur la perte du corps.